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30 septembre 2010 4 30 /09 /septembre /2010 10:34

banniere buffon internet

 

  Bonjour à toutes et tous !
Nouvel extrait des oeuvres de Buffon. Petite précision utile, mes citations se font dans l'ordre exacte de L'Histoire naturelle. Vous aurez ainsi un aperçu de ses écrits, si vous ne les avez pas déjà lu, où si vous n'avez pas le temps de les lire !
Personnellement, je reste fasciné par cette aisance dans le phrasé très long, parfois dix, quinze lignes pour une unique phrase, pourtant très claire !
Nous sommes également trois siècles en arrière, et parfois, bien sûr, nous nous retrouvons confrontés à des évidences, des "erreurs", des doutes qui sont aujourd'hui des "certitudes". Mais c'est l'intérêt de ces lectures d'ouvrages essentiels de l'Histoire des Sciences.

Les citations que vous lisez sur mon blog sont aussi remaniées par mes soins pour ce qui concernent l'orthographe, rendu contemporaine. Cela facilite la lecture, et ne change strictement rien à la pensée et aux observations de Buffon.


Second Discours
Histoire et Théorie de la Terre

" A la vérité nos connaissances à cet égard seront toujours bornées : nous ne connaissons point encore la surface entière du globe, nous ignorons en partie ce qui se trouve au fond des mers ; il y en a dont nous n’avons pu sonder les profondeurs : nous ne pouvons pénétrer que dans l’écorce de la Terre, & les plus grandes cavités, les mines les plus profondes ne descendent pas à la huit millième partie de son diamètre ; nous ne pouvons donc juger que de la couche extérieure & presque superficielle, l’intérieur de la masse nous est entièrement inconnu : on sait que, volume pour volume, la Terre pèse quatre fois plus que le Soleil ; on a aussi le rapport de sa pesanteur avec les autres planètes, mais ce n’est qu’une estimation relative, l’unité de mesure nous manque, le poids réel de la matière nous étant inconnu, en sorte que l’intérieur de la terre pourrait être ou vide ou rempli d’une matière mille fois plus pesante que l’or, & nous n’avons aucun moyen de le reconnaître ; à peine pouvons nous former sur cela quelques conjectures raisonnables.


Il faut donc nous borner à examiner & à décrire la surface de la Terre, & la petite épaisseur intérieure dans laquelle nous avons pénétré. La première chose qui se présente, c’est l’immense quantité d’eau qui couvre la plus grande partie du globe ; ces eaux occupent toujours les parties les plus basses, elles sont aussi toujours de niveau, & elles tendent perpétuellement à l’équilibre & au repos : cependant nous les voyons agitées par une forte puissance, qui s’opposant à la tranquillité de cet élément, lui imprime un mouvement périodique & réglé, soulève & abaisse alternativement les flots, & fait un balancement de la masse totale des mers en les remuant jusqu’à la plus grande profondeur. Nous savons que ce mouvement est de tous les temps, & qu’il durera autant que la lune & le soleil qui en sont les causes.


Considérant ensuite le fond de la mer, nous y remarquons autant d’inégalités que sur la surface de la terre ; nous y trouvons des hauteurs, des vallées, des plaines, des profondeurs, des rochers, des terreins de toute espèce ; nous voyons que toutes les îles ne sont que les sommets de vastes montagnes, dont le pied & les racines sont couvertes de l’élément liquide ; nous y trouvons d’autres sommets de montagnes qui sont presqu’à fleur d’eau, nous y remarquons des courants rapides qui semblent se soustraire au mouvement général : on les voit se porter quelquefois constamment dans la même direction, quelquefois rétrograder & ne jamais excéder leurs limites, qui paroissent aussi invariables que celles qui bornent les efforts des fleuves de la terre. Là sont ces contrées orageuses où les vents en fureur précipitent la tempête, où la mer & le ciel également agité se choquent & se confondent : ici sont des mouvements intestins, des bouillonnements , des trombes & des agitations extraordinaires causées par des volcans dont la bouche submergée vomit le feu du sein des ondes, & pousse jusqu’aux nues une épaisse vapeur mêlée d’eau, de soufre & de bitume.


Plus loin je vois ces gouffres dont on n’ose approcher, qui semblent attirer les vaisseaux pour les engloutir : au delà j’aperçois ces vastes plaines toujours calmes & tranquilles, mais tout aussi dangereuses, où les vents n’ont jamais exercé leur empire, où l’art du Nautonnier devient inutile, où il faut rester & périr ; enfin portant les yeux jusqu’aux extrémités du globe, je vois ces glaces énormes qui se détachent des continents des pôles, & viennent comme des montagnes flottantes voyager & se fondre jusque dans les régions tempérées.

 

Voilà les principaux objets que nous offre le vaste empire de la mer ; des milliers d’habitants de différentes espèces en peuplent toute l’étendue, les uns couverts d’écailles légères en traversent avec rapidité les différents pays, d’autres chargés d’une épaisse coquille se traînent pesamment & marquent avec lenteur leur route sur le sable ; d’autres à qui la Nature a donné des nageoires en forme d’ailes, s’en servent pour s’élever & se soutenir dans les airs ; d’autres enfin à qui tout mouvement a été refusé, croissent & vivent attachés aux rochers ; tous trouvent dans cet élément leur pâture ; le fond de la mer produit abondamment des plantes, des mousses & des végétations encore plus singulières ; le terrain de la mer est de sable, de gravier, souvent de vase, quelquefois de terre ferme, de coquillages, de rochers, & partout il ressemble à la terre que nous habitons. "

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