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5 août 2010 4 05 /08 /août /2010 10:54

Bonjour à toutes et tous !

 

abordons un pur chef d'oeuvre, n'ayons pas peur des mots ! Je crois que toute personne qui l'a visionné est du même avis... Je ne vais pas vous faire une trop longue chronique cinématographique, je vais juste aborder un aspect qui concerne directement l'écriture de SF, autant filmique que littéraire, que reste-t-il du passé dans le futur ?

Il s'agit donc de Bienvenue à Gattaca d'Andrew Nicoll, de 1977.

L'un des aspects les plus frappants de ce film, et qui explique, entre autre, le trouble fascinant qu'il provoque chez ses spectateurs, est l'absence totale d'iconographie futuriste pour un film d'Anticipation...
Il y a là certainement un souci de ne pas greffer le budget du film par des effets spéciaux, décors à construire, etc...
Mais surtout, c'est un vrai et formidable parti pris de narration !!

Objectivement, ce film n'est pas un film de SF, Pourtant, il se passe dans le futur...

Les décors sont réels, les maisons réels, les meubles en bois, les fusées une simple trace dans le ciel, les habits quasi rétro.
Mieux même ! Deux des principaux personnages conduisent de vieilles voitures, qui portent en eux un message très fort ! Ils s'agit d'un cabriolet DS Citroën et d'une Studbaker Avanti, deux voitures hors-normes, décalés dans une production automobile plus banale. Signe fort et contradictoire pour ces personnages censés être sélectionnés génétiquement pour entrer à l'école astronautique, qui vivent dans un monde ne supportant plus  "l'imperfection"...
Dernière audace du film, même le scaphandre de l'astronaute est remplacé par un costume cravate ! Ce métier rare, ou la sélection est déjà un fait établi, pourrait en être un autre, employé de bureau par exemple... Ce signe élargit le propos du film, le rend universel, et non anecdotique.

Et tout cela semble normal, ne provoque aucun rejet. bien au contraire, cela rend le film intelligent, ambivalent, fascinant, ouvert à tout type de publics.
Où sommes-nous véritablement ? Dans un monde possible ? Dans une extrapolation certaine du nôtre actuel ? Dans le passé des idées eugénistes du début du 20ème siècle, qui se prolongent encore ? Partout à la fois, dans les abîmes de l'Humanité ?

J'ai visionné déjà trois fois Bienvenue à Gattaca. Je ne vais pas tarder à le revoir à nouveau. Car il est une source constante de réflexion et de plaisir. 36, quai du Futur est en effet au coeur de cette problématique, "que reste-t-il du passé dans le futur ?". Beaucoup de choses !!!

Mon objectif est de développer en priorité une SF proche dans le temps, accessible à un public d'amateurs, mais aussi d'un public curieux peu habitué à la littérature d'imagination, avec une approche thématique.

Et le meilleur moyen pour atteindre cet objectif ambitieux, c'est de refuser de partir dans la pure imagination. Qui est un autre domaine d'écriture, plus ultime, où seuls des gens comme Serge Brusselo,  Pierre Pelot ou Jack Vance peuvent s'aventurer pour des dizaines de romans...

Un des outils que j'ai développé pour 36, quai du Futur est un planisphère réécrit. Continents par continents, pays par pays, tout est réécrit, pensé dans une évolution plus ou moins logique.
Et cette recherche narrative revient régulièrement dans mes nouvelles, dans les romans à venir, comme ossature discrète. L'écriture aussi alimente cette planisphère, car des inventions arrivent qui mérite de rester, de resservir ailleurs.

Pour ma part, j'aime à torturer le présent, le morceller, en conserver ce qui me semble logique, sympathique, terrifiant, grotesque, beau, laid, pour l'emmener dans un futur probable ou très imaginatif, mais qui conservera une vraisemblance proche de nos références actuels.

Nous ne serons pas perdus. Nous serons chez nous. Pourtant, ce n'est plus vraiment chez nous... Bien sûr, écrire dans cette optique peut amener certains connaisseurs et amateurs à percevoir cette SF comme moins forte, plus sage, moins fortement prospective, moins dingue !

C'est ainsi. On ne peut pas écrire quatorze littératures à la fois, il faut faire des choix cohérents.
Ceci dit, rien n'empêche d'être imaginatif, de pulvériser nos visions étroites du monde, et en même temps d'être assez proche dans le temps, et très vraisemblable dans certaines parties du récit !

Ecrire un récit qui se passe dans cinquante ans ne signifie pas que l'on n'a pas de talent ou d'ambition !!
Au contraire même. La "pure imagination" vous permet tous les excès, tous les délire, tandis que "l'imagination vraisemblable" demande une attention de tous les instants pour jongler entre vraisemblance et invraisemblance.

Car je suis d'accord sur un point que vous partagez j'espère.
Ecrire un récit SF soi-disant réaliste n'a guère de sens... L'on risque de s'ennuyer ferme, et les auteurs ne sont pas des futurologues, des statisticiens, des planificateurs, des  devins.
Les auteurs sont là pour apporter du plaisir de lecture, c'est là leur fonction essentielle.

A bientôt, avec sans doute une chronique sur Stanislas Lem !
Gulzar

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