Bonjour à toutes et à tous !
Une petite chronique cinéma ce matin, pour bien débuter le weekend !
Il s'agit du Projet Blair Witch, film de Daniel Myrick et Eduardo Sanchez dont tout le monde a parlé à sa sortie, que je ne suis pas allé voir, guère intéressé en fait par le sujet. L'enthousiasme des spectateurs n'avait pas suffit à me convaincre !
Et puis, j'ai fini par emprunter le dvd à la bibliothèque, toujours avec le souci de ne rien rater...
Me voici donc en train de visionner ce fameux film d'horreur, qui ne serait donc constitué que des images retrouvées après la disparition de ceux qui les ont tournées... Nous voyons donc, non une fiction, mais un documentaire, en réalité les rushs du documentaire, laissés en l'état.
Très vite, je suis pris par l'ambiance potache. Une jeune réalisatrice amateur part donc avec deux techniciens son et image réaliser un documentaire sur une sorcière qui aurait vécue dans les bois autour d'une petite ville du Maryland, où d'affreux assassinats d'enfants ont eu lieu par le passé. Après quelques interviews des habitants, ils s'enfoncent dans la forêt filmer un cimetière. Mais ils se perdent dans les bois, n'arrivent plus à en sortir...
Et les premières manifestations d'une présence hostile apparaissent..!
Comme à l'habitude, je ne vous dis pas la fin, au cas où vous n'auriez pas vu ce petit chef d'oeuvre cinématographique ! Les scénaristes réalisateurs ont vraiment su donner une forme très cohérente à leur film. c'est le réalisme des situations qui engendre la terreur, les interrogations, plus encore que les traces de sorcellerie, composées de cailloux et branches d'arbres assemblés en signes d'avertissement.
Mais détaillons un peu. Le film par exemple est le fruit du mélange de deux caméras, l'une vidéo en couleurs et l'autre 16 mm en noir et blanc, qui est la caméra filmant le documentaire. Nous passons donc souvent d'un point de vue à un autre, le documentaire et la vidéo filmant ce qui se passe entre les trois protagonistes, tournageà la main, plus maladroit donc. Nous avons aussi très souvent du son des conversations sans avoir l'image de celle ou celui qui parle.
La forme cinématographique est donc déjà un puzzle en soi. Nous devons sans cesse reconstituer, imaginer ce que nous ne voyons pas. Nous ne sommes jamais de front avec les trois personnages. Alors que nous sommes confrontés aussi à une grave énigme... La sorcière habite-elle encore la forêt, menace-t-elle nos trois sympathiques cinéastes ?
Tout l'intérêt du film est aussi dans l'étude comportementale réussie des trois personnages. Leurs intéractions, leur égoïsme, leurs angoisses, leur altruisme, leurs incompétences ou faiblesses surgissent au bon moment...
La réalisatrice sûre d'elle, sûre de filmer du passé, du légendaire ne peut imaginer le danger, et petit à petit perd son autorité sur les deux garçons, car elle ne veut pas reconnaître qu'ils sont perdus...
Le preneur de son jette la carte dans la rivière, persuadé que la réalisatrice ne sait pas la lire... Il est le plus sensible, le moins résistant phsychologiquement.
Le preneur d'image tente plus ou moins de prendre le pouvoir, mais sans l'assumer vraiment...
Ce ne sont que trois jeunes adultes citadins confrontés à la nature sauvage, ou personne n'est là pour vous aider...
Chaque détail compte, chaque objet devient le centre du monde ! La carte salvatrice est perdue, le DAT ou la caméra 16 mm qu'ils doivent rendre au magasin où ils les ont loués devient leur préoccupation, une manière de conjurer la peur.
Ils ne doivent pas sortir de la forêt car ils risquent de mourir, mais pour rendre à temps le matériel... L'objet sert de support à leurs peurs.
Rationnellement, nous ne croyons pas à une sorcière vivant dans ces bois depuis deux siècles ! Mais alors qui pourchasse nos trois égarés ? Car nous entendons bien des bruits de pas, nous voyons les tas de cailloux dressés la nuit devant la tente, les figurines humaines faîtes de branches accrochées aux arbres, qui est d'ailleurs l'emblème du film !
Qui sont ce ou ces personnages que nous ne verrons jamais ? Un dément, une démente qui perpétue la tradition ? Des habitants de la ville ? Une Ermite ? Un membre du groupe de cinéastes, ce qui semble impossible au vu des rushs ? Des amis du groupe qui leurs font une blague ? Utilise-t-on cette légende de sorcière pour camoufler quelque chose ?
Et puis, il y a l'histoire elle-même, son absence totale d'explication finale... On ne sait pas vraiment comment cela finit, qui tue, si jamais il y a tuerie d'ailleurs...
Car c'est là je trouve la force du film. Nous ne savons pas s'il y a assassinat ! Il ne s'agit pas seulement de cacher l'identité d'un monstre, d'une force occulte ou satanique, mais bien de nous plonger dans l'errance, l'absence de certitudes jusqu'au bout !
Ce film fait discuter, s'interroger.
Je confesse avoir vu les trois dernières minutes du film image par image pour tenter d'y comprendre quelque chose, d'apercevoir un détail ténu... En pure perte...
Le projet blair witch est diabolique ! D'un formalisme qui n'a l'air de rien, mais qui se révèle d'une grande cohérence, complétement en symbiose avec le propos du film, ne rien montrer, ne rien démontrer, ne rien révéler, mais alors rien du tout...
Le film nous indique simplement ceci. En ce bas-monde, Il n'y a pas de réponses à nos interrogations les plus essentielles. Et il n'y en aura pas.
Même avec une caméra. Car l'image n'est rien.
La technologie ne vous sera d'aucune utilité si vous êtes perdus dans une grande forêt...
Décidément, plus je regarde des films d'horreur, de zombies, et autres gâteries cinématographiques, que je négligeais avant de commencer mon travail d'écriture SF, plus j'y trouve de bonnes choses...
A bientôt ! Avec sans doute la chronique sur REC, un autre film d'horreur, espagnol cette fois, dont on m'a dit le plus grand bien !
Gulzar