Résumé
Questions et fromages
Pour ne pas déplaire au factionnaire Merle qui avait son destin entre ses mains, Wictorius s’obligea à ingurgiter avec le sourire l’emmental de seize ans d’âge. Il n’y avait aucun doute, cette pâte ne sortait pas d’une rassurante usine alimentaire. Autant il n’aimait guère manger du Snug pour pauvres, autant il ne se risquait jamais à avaler la moindre bouchée d’un aliment à peine sorti du derrière d’une vache, d‘après les explications du factionnaire Merle qui finissait son en-cas avec un petit verre de vin blanc.
- Un petit verre, l’étranger ?
- Non, merci. Vous n’aviez pas à m’interroger ?
- Ah oui, bien sûr. Alors, je reprends mon formulaire Front-39 !
Sous le regard de l’émérite Président Gustave Farindol, sixième du nom, l’honnête factionnaire entreprit de découvrir ce que faisait Wictorius en Haute-Savoie sans y avoir été invité.
- Bon, alors, commençons par le commencement. Comment vous appelez-vous ?
Reprenant une ancienne identité pouvant convenir, Wictorius annonça la bonne nouvelle à son interlocuteur en sobre uniforme à casquette.
- Je me nomme Claudio Lewis Tross, anthropologue professionnel brazilien. Je prépare un ouvrage sur les peuplades d’Europe et malencontreusement, j’ai traversé la frontière franco-suisse sans m’en apercevoir… Vous m’en voyez sincèrement désolé…
- C’est bien ma chance, tomber sur un noir intellectuel ! Enfin, ça nous change des Parisiens.
- Couleur ébène, je suis de couleur ébène ! Pas noir.
- C’est comme vous voulez, je coche étranger de couleur foncé. Comme vous aimez nos fromages, je veux bien être conciliant !
- Et pour descendre en ville, vous avez des bus, une ligne aérienne ?
- En ville, en ville… Et pourquoi pas en Suisse, puisque vous en venez ?
- C’est-à-dire que je préférerais ne plus y revenir… Je ne supporte plus d’entendre leurs coucous.
La suite demain !