Résumé
Wictorius et son sucre
Pour se consoler, Wictorius reprit trois tasses de café. Il ne pourrait donc pas quitter La Chapelle d’Abondance aujourd’hui, ni même demain. Il devrait encore rester dans ce village fortifié, à la merci d’une administration tatillonne et de bandes d’ours qui terrorisaient la région. Pourvu qu’il n’ait pas à tuer un animal, Wictorius détestait faire couler le sang. On est civilisé ou on ne l’est pas.
Suspicieux, il se força enfin à se saisir d’un morceau de sucre et à le mettre dans son café. Jamais il n’en avait vu de cette couleur sale et vaguement cubique. Le sucre se devait d’être poudreux et blanc. La France recelait donc encore bien des mystères. Dire qu’il devrait probablement traverser cet enfer alimentaire pour poursuivre sa lutte implacable contre le Canard Déchaîné. Wictorius en oubliait presque pourquoi il avait traversé l’Atlantique pour venir échouer dans ces montagnes restées à l’ère préhistorique.
Heureusement, le café était délicieux.
- Vous féliciterez vos amis algériens, leur breuvage vaut presque le brazilien !
Le Factionnaire regarda distraitement l’heure à l’horloge murale. Puis réalisa qu’il avait pris son après-midi. Pour son anniversaire, il pouvait tout de même négliger son travail à la Mairie.
- Il faut féliciter mon épouse, c’est elle qui va une fois l’an se ravitailler au Lac Léman. Moi, je descends pas d’ici, fidèle au poste. Notre pays doit se méfier de tous nos voisins plus ou moins monarchiques et inféodés aux monopoles mondialisés !
De service l’après-midi, le garde Totor se leva, salua la tablée.
- Gardez-moi une part de gâteau ! Bon après-midi, Monsieur Lewis Tross. Vous êtes couleur d’ébène comme vous dites, mais vous êtes bien sympathique pour un anthropologue. On a pas l’air comme ça, mais dans nos montagnes, on admire beaucoup l’intelligence ! J’ai moi-même une trentaine de livres.
La suite demain !