Après la sieste
Une longue sieste de six heures lui fit le plus grand bien. Le corps surpuissant de Wictorius demandait du repos pour fonctionner à plein. Ses habits de prédicateur catholique peinaient d’ailleurs à le contenir. Heureusement, grâce à son minuscule nécessaire à couture qu’il portait toujours sur lui, il avait pu l’élargir quelque peu.
- Chef, je passe par où ? Ils pourraient mettre des panneaux indicateurs sur flotteurs !
Encore ensommeillé, Wictorius pénétra dans le poste de pilotage où Dolph se débattait avec des cartes périmées. Tout l’aval du fleuve changeait chaque année, chaque saison. Les îlots de verdure disparaissaient, réapparaissaient selon des lois obscures que les Intelligences Artificielles de l’Institut de Cartographie Compulsive ne parvenaient pas à déterminer.
À moins que les guides amazoniens en pirogue ne les sabotent pour conserver leur monopole. Ces gens étaient prêts à tout pour conserver leur emploi, paraît-il.
- Suivez les instructions de Senhora Beatrix !
- C’est ce que je fais. Nous remontons vers Manáos, mais les arbres terroristes empruntent différentes bras du fleuve, qui se divisent aussitôt en d‘autres bras… Je suis un peu perdu, à vrai dire, Chef…
- Mais non, mais non. Tenez, prenez du côté de ce paquebot échoué.
- J’adore les paquebots, le combat rapproché dans les coursives !
Wictorius laissa Dolph manœuvrer au mieux. Il en était certain, la base secrète de la félonne Fréda Caron n’était pas aussi près de l’Océan, aussi près de la Civilisation.
Mal connue, la capitale amazonienne Manáos l’angoissait bien plus. Le Suprême Coordinateur ne parvenait pas véritablement à la surveiller de près. Les pauvres fonctionnaires en déshérence de la défunte Brazilia n’y mettait même plus les pieds, obligés à pratiquer des petits métiers administratifs sur la côte.
Justement rendue à la Nature, l’architecture élancée et bétonnée de l’illustre Niemeyer comblait désormais de joie les singes.
La suite demain !