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28 mai 2012 1 28 /05 /mai /2012 08:04

banniere buffon internet

 

Aujourd'hui, suite des expériences sur la semence, cette fois-ci sur le lapin... 

 

 

CHAPITRE VI.

Expériences au sujet de la génération.

 

 

PREMIERE EXPERIENCE.

 

 

XVII.

 

 

J’ai fait ouvrir successivement, et à différents jours, dix lapins, pour observer et examiner avec soin leur liqueur séminale : le premier n’avait pas une goutte de cette liqueur, ni dans les testicules, ni dans les vésicules séminales ; dans le second je n’en trouvai pas davantage, quoique je me fusse cependant assuré que ce second lapin était adulte, et qu’il fût même le père d’une nombreuse famille ; je n’en trouvai point encore dans le troisième, qui étoit cependant aussi dans le cas du second. Je m’imaginais qu’il fallait peut-être approcher ces animaux de leur femelle pour exciter et faire naître la semence, et je fis acheter des mâles et des femelles que l’on mit deux à deux dans des espèces de cages où ils pouvaient se voir et se faire des caresses, mais où il ne leur était pas possible de se joindre.

 Cela ne me réussit pas d’abord, car on en ouvrit encore deux, où je ne trouvai pas plus de liqueur séminale que dans les trois premiers : cependant le sixième que je fis ouvrir en avoit une grande abondance, c’étoit un gros lapin blanc qui paroissait fort vigoureux ; je lui trouvai dans les vésicules séminales autant de liqueur congelée qu’il en pouvoit tenir dans une petite cuillière à caffé, cette matière ressemblait à de la gelée de viande, elle était d’un jaune citron et presque transparente ; l’ayant examinée au microscope, je vis cette matière épaisse se résoudre lentement et par degrés en filaments et en gros globules, dont plusieurs paroissaient attacher les uns aux autres comme des grains de chapelet, mais je ne leur remarquais aucun mouvement bien distinct, seulement comme la matière se liquéfiait, elle formait une espèce de courant par lequel ces globules et ces filaments paraissaient tous être entraînés du même côté : je m’attendais à voir prendre à cette matière un plus grand degré de fluidité, mais cela n’arriva pas ; après qu’elle se fut un peu liquéfiée, elle se dessécha, et je ne pus jamais voir autre chose que ce que je viens de dire, en observant cette matière sans addition ; je la mêlai donc avec de l’eau, mais ce fut encore sans succès d’abord, car l’eau ne la pénétrait pas tout de suite, et semblait ne pouvoir la délayer. 

 

XVIII.

 

 

Ayant fait ouvrir un autre lapin, je n’y trouvai qu’une très petite quantité de matière séminale, qui était d’une couleur et d’une consistance différente de celle dont je viens de parler, elle était à peine colorée de jaune, et plus fluide que celle-là ; comme il n’y en avait que très-peu, et que je craignais qu’elle ne se desséchât trop promptement, je fus forcé de la mêler avec de l’eau dès la première observation, je ne vis pas les filamens ni les chapelets que j’avais vs dans l’autre, mais je reconnus sur le champ les gros globules, et je vis de plus qu’ils avaient tous un mouvement de tremblement et comme d’inquiétude ; ils avaient aussi un mouvement de progression, mais fort lent, quelques-uns tournaient aussi autour de quelques autres, et la plupart paroissaient tourner sur leur centre. Je ne pus pas suivre cette observation plus loin, parce que je n’avois pas une assez grande quantité de cette liqueur séminale, qui se desséchat promptement.


 

XIX.

 

 

Ayant fait chercher dans un autre lapin, on n’y trouva rien du tout, quoiqu’il eût été depuis quelques jours aussi voisin de sa femelle que les autres ; mais dans les vésicules séminales d’un autre on trouva presque autant de liqueur congelée que dans celui de l’observation XVII. 

Cette liqueur congelée, que j’examinai d’abord de la même façon, ne me découvrit rien de plus, en sorte que je pris le parti de mettre infuser toute la quantité que j’en avais pu rassembler, dans une quantité presque double d’eau pure, et après avoir secoué violemment et souvent la petite bouteille où ce mélange était contenu, je le laissai reposer pendant dix minutes, après quoi j’observai cette infusion en prenant toujours à la surface de la liqueur les gouttes que je voulois examiner : j’y vis les mêmes gros globules dont j’ai parlé, mais en petit nombre et entièrement détachés et séparés, et même sort éloignés les uns des autres ; ils avaient différents mouvemens d’approximation les uns à l’égard des autres, mais ces mouvements étaient si lents, qu’à peine étaient-ils sensibles. 

Deux ou trois heures après il me parut que ces globules avaient diminué de volume, et que leur mouvement étoit devenu plus sensible, ils paroissaient tous tourner sur leurs centres ; et quoique leur mouvement de tremblement fût bien plus marqué que celui de progression, cependant on apercevoit clairement qu’ils changeaient tous de place irrégulièrement les uns par rapport aux autres, il y en avait même quelques-uns qui tournaient lentement autour des autres. 

Six ou sept heures après les globules étaient encore devenus plus petits, et leur action était augmentée ; ils me parurent être en beaucoup plus grand nombre, et tous leurs mouvemens étoient sensibles. Le lendemain il y avait dans cette liqueur une multitude prodigieuse de globules en mouvement, et ils étaient au moins trois fois plus petits qu’ils ne m’avaient paru d’abord. 

J’observais ces globules tous les jours plusieurs fois pendant huit jours, il me parut qu’il y en avait plusieurs qui se joignaient et dont le mouvement finissoit après cette union, qui cependant ne paroissait être qu’une union superficielle et accidentelle ; il y en avait de plus gros, de plus petits, la plupart étoient ronds et sphériques, les autres étaient ovales, d’autres étaient longuets, les plus gros étaient les plus transparents, les plus petits étoient presque noirs ; cette différence ne provenoit pas des accidents de la lumière, car dans quelque plan et dans quelque situation que ces petits globules se trouvassent, ils étaient toujours noirs, leur mouvement éaoit bien plus rapide que celui des gros, et ce que je remarquai le plus clairement et le plus généralement sur tous, ce fut leur diminution de grosseur, en sorte qu’au huitième jour ils étoient si petits que je ne pouvois presque plus les apercevoir, et enfin ils disparurent absolument à mes yeux sans avoir cessé de se mouvoir.


 

XX.

 

 

Enfin ayant obtenu avec assez de peine de la liqueur séminale d’un autre lapin, telle qu’il la fournit à sa femelle, avec laquelle il ne reste pas plus d’une minute en copulation, je remarquais qu’elle était beaucoup plus fluide que celle qui avoit été tirée des vésicules séminales, et les phénomènes qu’elle offrit étoient aussi sort différents ; car il y avait dans cette liqueur les globules en mouvement dont j’ai parlé, et des filamens sans mouvement, et encore des espèces de globules avec des filets ou des queues, et qui ressemblaient assez à ceux de l’homme et du chien, seulement ils me parurent plus petits et beaucoup plus agiles ; ils traversaient en un instant le champ du microscope ; leurs filets ou leurs queues me parurent être beaucoup plus courtes que celles de ces autres animaux spermatiques, et j’avoue que, quelque soin que je me sois donné pour les bien examiner, je ne suis pas sûr que quelques-unes de ces queues ne fussent pas de fausses apparences produites par le sillon que ces globules mouvants formaient dans la liqueur qu’ils traversaient avec trop de rapidité pour pouvoir les bien observer ; car d’ailleurs cette liqueur, quoiqu’assez fluide, se desséchait fort promptement.

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5 mai 2012 6 05 /05 /mai /2012 07:04

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Aujourd'hui, suite des expériences sur le chien, sacrifié à la science. C'est technique et fascinant à la fois, la description n'entraînant pas une réelle compréhension... Mais l'on s'approche du mystère testiculaire...

 

 

CHAPITRE VI.

Expériences au sujet de la génération.

 

 

PREMIERE EXPERIENCE.

 

 

XIII.


Le petit verre qui contenait cette liqueur ayant été renversé par accident, je pris une troisième fois de la liqueur du même chien ; mais soit qu’il fut fatigué par des émissions trop réitérées, soit par d’autres causes que j’ignore, la liqueur séminale ne contenait rien du tout, elle étoit transparente et visqueuse comme la lymphe du sang, et l’ayant observée dans le moment et une heure, deux heures, trois heures et jusqu’à vingt-quatre heures après, elle n’offrit rien de nouveau, sinon beaucoup de gros globules obscurs, il n’y avait aucun corps mouvant, aucun mucilage, rien, en un mot, de semblable à ce que j’avais vu les autres fois.

 

XIV.

 

Je fis ensuite ouvrir un chien et je fis séparer les testicules et les vaisseaux qui y étoient adhérents, pour répéter les mêmes observations, mais je remarquai qu’il n’y avait point de vésicules séminales, et apparemment dans ces animaux la semence passe directement des testicules dans l’urètre. 

Je ne trouvai que très peu de liqueur dans les testicules, quoique le chien fût adulte et vigoureux, et qu’il ne fût pas encore mort dans le temps que l’on cherchait cette liqueur. J’observai au microscope la petite quantité que je pus ramasser avec le gros bout d’un cure-dent ; il n’y avait point de corps en mouvement semblables à ceux que j’avais vus auparavant, on y voyoit seulement une grande quantité de très-petits globules dont la plupart étaient sans mouvement, et dont quelques-uns, qui étaient les plus petits de tous, avaient entr’eux différents petits mouvements d’approximation que je ne pus pas suivre, parce que les gouttes de liqueur que je pouvais ramasser, étaient si petites qu’elles se desséchoient deux ou trois minutes après qu’elles avaient été mises sur le porte-objet. 

 

XV.

 

Ayant mis infuser les testicules de ce chien, que j’avais fait couper chacun en deux parties, dans un bocal de verre où il y avoit assez d’eau pour les couvrir, et ayant fermé exactement ce bocal, j’ai observé trois jours après cette infusion que j’avais faite dans le dessein de reconnaitre si la chair ne contient pas des corps en mouvement ; je vis en effet dans l’eau de cette infusion une grande quantité de corps mouvants de figure globuleuse et ovale, et semblables à ceux que j’avais vus dans la liqueur séminale du chien, à l’exception qu’aucun de ces corps n’avait de filets ; ils se mouvaient en tout sens, et même avec assez de vîtesse. 

J’observai long-temps ces corps qui paraissaient animés, j’en vis plusieurs changer de figure sous mes yeux, j’en vis qui s’alongeaient, d’autresqui se raccourcissaient, d’autres, et cela fréquemment, qui se gonflaient aux deux extrémités ; presque tous paraissaient tourner sur leur centre, il y en avait de plus petits et de plus gros, mais tous étoient en mouvement, et à les prendre en totalité, ils étoient de la grosseur et de la figure de ceux que j’ai décrits dans la IVe expérience.

 

XVI.

 

Le lendemain le nombre de ces globules mouvants était encore augmenté, mais je crus m’apercevoir qu’ils étaient plus petits ; leur mouvement était aussi plus rapide et encore plus irrégulier, ils avaient une autre apparence pour la forme et pour l’allure de leur mouvement, qui paraissait être plus confus ; le sur-lendemain et les jours suivants il y eut toujours des corps en mouvement dans cette eau, jusqu’au vingtième jour ; leur grosseur diminuait tous les jours, et enfin diminua si fort que je cessai de les apercevoir uniquement à cause de leur petitesse, car le mouvement n’avait pas cessé, et les derniers que j’avais beaucoup de peine à apercevoir au dix neuvième et vingtième jour, se mouvaient avec autant et même plus de rapidité que jamais. Il se forma au dessus de l’eau une espèce de pellicule qui ne paraissait composée que des enveloppes de ces corps en mouvement, et dont toute la substance paraissait être un lacis de tuyaux, de petits filets, de petites écailles, etc. toutes sans aucun mouvement ; cette pellicule et ces corps mouvants n’avaient pu venir dans la liqueur par le moyen de l’air extérieur, puisque le bocal avait toujours été très soigneusement bouché.


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22 avril 2012 7 22 /04 /avril /2012 07:59

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Aujourd'hui, suite de la première expérience avec le microscope de M. Needham. Puis, ensuite passage au chien...

 

 

CHAPITRE VI.

Expériences au sujet de la génération.

 

 

PREMIERE EXPERIENCE.

 

X


J’avais bien reconnu par les observations que j’ai rapportées les premières, que ces petits corps mouvants changeaient de figure, et je croyais m’être aperçu qu’en général ils diminaient tous de grandeur, mais je n’en étais pas assez certain pour pouvoir l’assurer. 

Dans ces dernières observations, à la douzième et treizième heure je le reconnus plus clairement, mais en même temps j’observais que quoiqu’ils diminuassent considérablement de grandeur ou de volume, ils augmentaient en pesanteur spécifique, surtout lorsqu’ils étaient prêts à finir de se mouvoir, ce qui arrivait presque tout-à-coup, et toujours dans un plan différent de celui dans lequel ils se mouvoient ; car lorsque leur action cessait, ils tombaient au fond de la liqueur et y formaient un sédiment couleur de cendre, que l’on voyoit à l’œil nu, et qui au microscope paraissait n’être composé que de globules attachés les uns aux autres, quelquefois en filets, et d’autres fois en groupes, mais presque toujours d’une manière régulière, le tout sans aucun mouvement.

 

XI.

 

Ayant pris de la liqueur séminale d’un chien, qu’il avait fournie par une émission naturelle en assez grande quantité, j’observai que cette liqueur était claire, et qu’elle n’avoit que peu de ténacité. Je la mis, comme les autres dont je viens de parler, dans un cristal de montre, et l’ayant examinée tout de suite au microscope sans y mêler de l’eau, j’y vis des corps mouvans presqu’entièrement semblables à ceux de la liqueur de l’homme, ils avaient des filets ou des queues toutes pareilles, ils étaient aussi à peu près de la même grosseur, en un mot ils ressemblaient presqu’aussi parfaitement qu’il est possible, à ceux que j’avais vus dans la liqueur humaine liquéfiée pendant deux ou trois heures.

Je cherchai dans cette liqueur du chien les filaments que j’avais vus dans l’autre, mais ce fut inutilement ; j’aperçus seulement quelques filets longuets et très déliés, entièrement semblables à ceux qui servaient de queues à ces globules ; ces filets ne tenaient point à des globules, et ils étoient sans mouvement. Les globules en mouvement et qui avaient des queues, me parurent aller plus vîte et se remuer plus vivement que ceux de la liqueur séminale de l’homme, ils n’avaient presque point de mouvement d’oscillation horizontale, mais toujours un mouvement de balancement vertical ou de roulis ; ces corps mouvants n’étoient pas en fort grand nombre, et quoique leur mouvement progressif fût plus fort que celui des corps mouvants de la liqueur de l’homme, il n’était cependant pas rapide, et il leur fallait un petit temps bien marqué, pour traverser le champ du microscope. 

 

J’observais cette liqueur d’abord continuellement pendant trois heures, et je n’y aperçus aucun changement et rien de nouveau ; après quoi je l’observais de temps à autre successivement pendant quatre jours, et je remarquai que le nombre des corps mouvans diminuoit peu à peu ; le quatrième jour il y en avait encore, mais en très petit nombre, et souvent je n’en trouvais qu’un ou deux dans une goutte entière de liqueur. 

Dès le second jour le nombre de ceux qui avaient une queue, étoit plus petit que celui de ceux qui n’en avaient plus ; le troisième jour il y en avoit peu qui eussent des queues ; cependant au dernier jour il en restait encore quelques-uns qui en avoient ; la liqueur avait alors déposé au fond un sédiment blancheâtre, qui paraissait être composé de globules sans mouvement, et de plusieurs petits filets, qui me parurent être les queues séparées des globules ; il y en avait aussi d’attaché à des globules, qui paroissaient être les cadavres de ces petits animaux, mais dont la forme étoit cependant différente de celle que je leur venois de voir lorsqu’ils étaient en mouvement, car le globule paraissait plus large et comme entr’ouvert, et ils étaient plus gros que les globules mouvants, et aussi que les globules sans mouvement qui étaient au fond et qui étaient séparés de leurs queues.

 

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7 avril 2012 6 07 /04 /avril /2012 09:08

 

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Aujourd'hui, première expérience avec le microscope de M. Needham. C'est assez long, mais passionnant...

 

 

CHAPITRE VI.

Expériences au sujet de la génération.

 

 


PREMIERE EXPERIENCE.

 

J’ai fait tirer des vésicules séminales d’un homme mort de mort violente, dont le cadavre était récent et encore chaud, toute la liqueur qui y était contenue, et l’ayant fait mettre dans un cristal de montre couvert, j’en ai pris une goutte assez grosse avec un cure-dent, et je l’ai mise sur le porte-objet d’un très-bon microscope double, sans y avoir ajoûté de l’eau et sans aucun mélange. La première chose qui s’est présentée, étaient des vapeurs qui montaient de la liqueur vers la lentille et qui l’obscurcissaient. 

Ces vapeurs s’élevaient de la liqueur séminale qui était encore chaude, et il fallut essuyer trois ou quatre fois la lentille avant que de pouvoir rien distinguer. Ces vapeurs étant dissipées, je vis d’abord des filamens assez gros, qui dans de certains endroits se ramifiaient et paroissaient s’étendre en différentes branches, et dans d’autres endroits ils se pelotonnaient et s’entremêlaient. Ces filaments me parurent très clairement agités intérieurement d’un mouvement d’ondulation, et ils paroissaient être des tuyaux creux, qui contenoient quelque chose de mouvant. 

Je vis très distinctement deux de ces filaments qui étaient joints suivant leur longueur, se séparer dans leur milieu et agir l’un à l’égard de l’autre par un mouvement d’ondulation ou de vibration, à peu près comme celui de deux cordes tendues qui seraient attachées et jointes ensemble par les deux extrémités, et qu’on tirerait par leur milieu, l’une à gauche et l’autre à droite, et qui feroient des vibrations par lesquelles cette partie du milieu se rapprocheroit et s’éloignerait alternativement ; ces filaments étaient composez de globules qui se touchaient et ressemblaient à des chapelets.

 Je vis ensuite des filaments qui se boursoufloient et se gonflaient dans de certains endroits, et je reconnus qu’à côté de ces endroits gonflés il sortait des globules et de petits ovales qui avaient un mouvement distinct d’oscillation, comme celui d’un pendule qui seroit horizontal : ces petits corps étaient en effet attachés au filament par un petit filet qui s’alongeait peu à peu à mesure que le petit corps se mouvait, et enfin je vis ces petits corps se détacher entièrement du gros filament, et emporter après eux le petit filet par lequel ils étaient  attachés. 

Comme cette liqueur état fort épaisse et que les filament étoient trop près les uns des autres pour que je pusse les distinguer aussi clairement que je le desiras, je délayai avec de l’eau de pluie pure et dans laquelle je m’étois assuré qu’il n’y avat point d’animaux, une autre goutte de la liqueur séminale ; je vis alors les filaments bien séparés, et je reconnus très distinctement le mouvement des petits corps dont je viens de parler ; il se faisat plus librement, ils paroissoient nager avec plus de vîtesse, et traînaent leur filet plus légèrement, et si je ne les avas pas vus se séparer des filament et en tirer leur filet, j’auras pris dans cette seconde observation le corps mouvant pour un animal, et le filet pour la queue de l’animal. 

J’observai donc avec grande attention un des filaments d’où ces petits corps mouvantssortaient il était plus de trois fois plus gros que ces petits corps ; j’eus la satisfaction de voir deux de ces petits corps qui se détachoient avec peine, et qui entraînoient chacun un filet fort délié et fort long, qui empêchait leur mouvement, comme je le dirai dans la suite.Cette liqueur séminale était d’abord fort épaisse, mais elle prit peu à peu de la fluidité, en moins d’une heure elle devint assez fluide pour être presque transparente ; à mesure que cette fluidité augmentoit, les phénomènes changeaient, comme je vais le dire.


II.

Lorsque la liqueur séminale est devenue plus fluide,on ne voit plus les filaments dont j’ai parlé ; mais les petits corps qui se meuvent, paroissent en grand nombre ils ont pour la plupart un mouvement d’oscillation comme celui d’un pendule, ils tirent après eux un long filet, on voit clairement qu’ils font effort pour s’en débarrasser ; leur mouvement de progression en avant est fort lent, ils font des oscillations à droite et à gauche : le mouvement d’un bateau retenu sur une rivière rapide par un cable attaché à un point fixe, représente assez bien le mouvement de ces petits corps, à l’exception que les oscillations du bateau se font toujours dans le même endroit, au lieu que les petits corps avancent peu à peu au moyen de ces oscillations, mais ils ne se tiennent pas toujours sur le même plan, ou, pour parler plus clairement, ils n’ont pas, comme un bateau, une base large et plate, qui fait que les mêmes parties sont toujours à peu près dans le même plan ; on les voit au contraire, à chaque oscillation, prendre un mouvement de roulis très considérable, en sorte qu’outre leur mouvement d’oscillation horizontale, qui est bien marqué, ils en ont un de balancement vertical, ou de roulis, qui est aussi très sensible, ce qui prouve que ces petits corps sont de figure globuleuse, ou du moins que leur partie inférieure n’a pas une base plate assez étendue pour les maintenir dans la même position.

 

III.

Au bout de deux ou trois heures, lorsque la liqueur est encore devenue plus fluide, on voit uneplus grande quantité de ces petits corps qui se meuvent ; ils paraissent être plus libres, les filets qu’ils traînent après eux sont devenus plus courts qu’ils ne l’étaient auparavant ; aussi leur mouvement progressif commence-t-il à être plus direct, et leur mouvement d’oscillation horizontale est fort diminué ; car plus les filets qu’ils traînent sont longs, plus grand est l’angle de leur oscillation, c’est-à-dire, qu’ils font d’autant plus de chemin de droite à gauche, et d’autant moins de chemin en avant, que les filets qui les retiennent et qui les empêchent d’avancer, sont plus longs, et à mesure que ces filets diminuent de longueur, le mouvement d’oscillation diminue et le mouvement progressif augmente ; celui du balancement vertical subsiste et se reconnaît toujours, tant que celui de progression ne se fait pas avec une grande vîtesse : or jusqu’ici pour l’ordinaire, ce mouvement de progression est encore assez lent, et celui de balancement est fort sensible.

 

IV.

Dans l’espace de cinq ou six heures la liqueur acquiert presque toute la fluidité qu’elle peut avoir sans se décomposer : on voit alors la plupart de ces petits corps mouvants entièrement dégagez du filet qu’ils traînaient ; ils sont de figure ovale, et se meuvent progressivement avec une assez grande vitesse, ils ressemblent alors plus que jamais à des animaux qui ont des mouvements en avant, en arrière et en tout sens. Ceux qui ont encore des queues, ou plutôt qui traînent encore leur filet, paraissent être beaucoup moins vifs que les autres ; et parmi ces derniers, qui n’ont plus de filet, il y en a qui paraissent changer de figure et de grandeur ; les uns sont ronds, la plûpart ovales, quelques autres ont les deux extrémités plus grosses que le milieu, et on remarque encore à tous un mouvement de balancement et de roulis.

 

V.

Au bout de douze heures la liqueur avait déposé au bas, dans le cristal de montre, une espèce de matière gélatineuse blancheâtre, ou plutôt couleur de cendre, qui avait de la consistance, et la liqueur qui surnageait était presqu’aussi claire que de l’eau, seulement elle avait une teinte bleuâtre, et ressemblait très bien à de l’eau claire dans laquelle on aurait mêlé un peu de savon ; cependant elle conservoit toujours de la viscosité, et elle filoit lorsqu’on en prenait une goutte et qu’on la voulait détacher du reste de la liqueur ; les petits corps mouvants sont alors dans une grande activité, ils sont tous débarrassés de leur filet, la plûpart sont ovales, il y en a de ronds, ils se meuvent en tout sens, et plusieurs tournent sur leur centre. 

J’en ai vu changer de figure sous mes yeux, et d’ovales devenir globuleux ; j’en ai vu se diviser, se partager, et d’un seul ovale ou d’un globule en former deux ; ils avaient d’autant plus d’activité et de mouvement, qu’ils étaient plus petits.

 

VI.

Vingt-quatre heures après la liqueur séminale avait encore déposé une plus grande quantité de matière gélatineuse ; je voulus délayer cette matière avec de l’eau pour l’observer, mais elle ne se mêla pas aisément, et il faut un temps considérable pour qu’elle se ramollisse et se divise dans l’eau. Les petites parties que j’en séparai, paraissaient opaques et composées d’une infinité de tuyaux, qui formaient une espèce de lacis où l’on ne remarquait aucune disposition régulière et pas le moindre mouvement ; mais il y en avait encore dans la liqueur claire, on y voyait quelques corps en mouvement, ils étaient à la vérité en moindre quantité ; le lendemain il y en avait encore quelques-uns, mais après cela je ne vis plus dans cette liqueur que des globules sans aucune apparence de mouvement.

Je puis assurer que chacune de ces observations a été répétée un très grand nombre de fois et suivie avec toute l’exactitude possible, et je suis persuadé que ces filets que ces corps en mouvement traînent après eux, ne sont pas une queue ou un membre qui leur appartienne et qui fasse partie de leur individu ; car ces queues n’ont aucune proportion avec le reste du corps, elles sont de longueur et de grosseur fort différentes, quoique les corps mouvants soient à peu près de la même grosseur dans le même temps ; les unes de ces queues occupent une étendue très considérable dans le champ du microscope, et d’autres sont fort courtes ; le globule est embarrassé dans son mouvement, d’autant plus que cette queue est plus longue, quelquefois même il ne peut avancer ni sortir de sa place, et il n’a qu’un mouvement d’oscillation de droite à gauche ou de gauche à droite lorsque cette queue est fort longue ; on voit clairement qu’ils paraissent faire des efforts pour s’en débarrasser.

 

 

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29 mars 2012 4 29 /03 /mars /2012 19:19

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Aujourd'hui, découvrons le bon usage du microscope de M. Needham. Si vous avez déjà eu la chance d'en utiliser un, vous y retrouverez à trois siècles de distance les mêmes consignes et caractéristiques...

 

 

CHAPITRE VI.

Expériences au sujet de la génération.

 

 

 

Les personnes qui ne sont pas fort habituées à se servir du microscope, trouveront bon que je mette ici quelques remarques qui leur seront utiles lorsqu’elles voudront répéter ces expériences ou en faire de nouvelles. 

On doit préférer les microscopes doubles dans lesquels on regarde les objets du haut en bas, aux microscopes simples et doubles dans lesquels on regarde l’objet contre le jour et horizontalement ; ces microscopes doubles ont un miroir plan ou concave qui éclaire les objets par dessous : on doit se servir par préférence, du miroir concave, lorsqu’on observe avec la plus forte lentille. Leeuwenhoek qui sans contredit a été le plus grand et le plus infatigable de tous les observateurs au microscope, ne s’est cependant servi, à ce qu’il parait, que de microscopes simples, avec lesquels il regardait les objets contre le jour ou contre la lumière d’une chandelle ; si cela est, comme l’estampe qui est à la tête de son livre parait l’indiquer, il a fallu une assiduité et une patience inconcevables pour se tromper aussi-peu qu’il l’a fait sur la quantité presqu’infinie de choses qu’il a observées d’une manière si désavantageuse. 

Il a légué à la Société de Londres tous ses microscopes, M. Needham m’a assuré que le meilleur ne fait pas autant d’effet que la plus forte lentille de celui dont je me suis servi, et avec laquelle j’ai fait toutes mes observations ; si cela est, il est nécessaire de faire remarquer que la plupart des gravures que Leeuwenhoek a données des objets microscopiques, sur-tout celles des animaux spermatiques, les représentent beaucoup plus gros et plus longs qu’il ne les a vus réellement.

...

Ce qui rend les microscopes dont nous parlons,  préférables à ceux avec lesquels on est obligé de regarder les objets contre le jour, c’est qu’ils sont plus stables que ceux-ci, le mouvement de la main avec laquelle on tient le microscope, produisant un petit tremblement qui fait que l’objet parait vacillant et ne présente jamais qu’un instant la même partie. 

Outre cela, il y a toujours dans les liqueurs un mouvement causé par l’agitation de l’air extérieur, soit qu’on les observe à l’un ou à l’autre de ces microscopes, à moins qu’on ne mette la liqueur entre deux plaques de verre ou de talc très-minces, ce qui ne laisse pas de diminuer un peu la transparence, et d’allonger beaucoup le travail manuel de l’observation ; mais le microscope qu’on tient horizontalement, et dont les porte-objets sont verticaux, a un inconvénient de plus, c’est que les parties les plus pesantes de la liqueur qu’on observe, descendent au bas de la goutte par leur poids, par conséquent il y a trois mouvements, celui du tremblement de la main, celui de l’agitation du fluide par l’action de l’air, et encore celui des parties de la liqueur qui descendent en bas. et il peut résulter une infinité de méprises de la combinaison de ces trois mouvements, dont la plus grande et la plus ordinaire est de croire que de certains petits globules qu’on voit dans ces liqueurs, se meuvent par un mouvement qui leur est propre et par leurs propres forces, tandis qu’ils ne font qu’obéir à la force composée de quelques-unes des trois causes dont nous venons de parler.

 

Lorsqu’on vient de mettre une goutte de liqueur sur leporte-objet du microscope double dont je me suis servi, quoique ce porte-objet soit posé horizontalement, et par conséquent dans la situation la plus avantageuse ; on ne laisse pas de voir dans la liqueur un mouvement commun qui entraîne du même côté tout ce qu’elle contient : il faut attendre que le fluide soit en équilibre et sans mouvement pour observer, car il arrive souvent que comme ce mouvement du fluide entraîne plusieurs globules et qu’il forme une espèce de courant dirigé d’un certain côté, il se fait ou d’un côté ou de l’autre de ce courant, et quelquefois de tous les deux, une espèce de remous qui renvoie quelques uns de ces globules dans une direction très différente de celle des autres.

L’œil de l’observateur se fixe alors sur ce globule qu’il voit suivre seul une route différente de celle des autres, et il croit voir un animal, ou du moins un corps qui se meut de soi-même, tandis qu’il ne doit son mouvement qu’à celui du fluide ; et comme les liqueurs sont sujettes à se dessécher et à s’épaissir par la circonférence de la goutte, il faut tâcher de mettre la lentille au dessus du centre de la goutte, et il faut que la goutte soit assez grosse et qu’il y ait une aussi grande quantité de liqueur qu’il se pourra, jusqu’à ce que l’on s’aperçoive que si on en prenait davantage il n’y aurait plus assez de transparence pour bien voir ce qui y est.

 

Avant que de compter absolument sur les observations qu’on fait, et même avant que d’en faire, il faut bien connaitre son microscope ; il n’y en a aucun dans les verres desquels il n’y ait quelques taches, quelques bulles, quelques fils, et d’autres défectuosités qu’il faut reconnoître exactement, afin que ces apparences ne se présentent pas comme si c’était des objets réels et inconnus ; il faut aussi apprendre à connaitre l’effet que fait la poussière imperceptible qui s’attache aux verres du microscope ; on s’assurera du produit de ces deux causes en observant son microscope à vuide un grand nombre de fois.

 

Pour bien observer, il faut que le point de vue ou le foyer du microscope ne tombe pas précisément sur la surface de la liqueur, mais un peu au dessous. 

On ne doit pas compter autant sur ce que l’on voit se passer à la surface, que sur ce que l’on voit à l’intérieur de la liqueur ; il y a souvent des bulles à la surface qui ont des mouvements irréguliers qui sont produits par le contact de l’air.

On voit beaucoup mieux à la lumière d’une ou de deux bougies basses, qu’au plus grand et au plus beau jour, pourvû que cette lumière ne soit point agitée, et pour éviter cette agitation, il faut mettre une espèce de petit paravent sur la table, qui enferme de trois côtés les lumières et le microscope.

 

On voit souvent des corps qui paraissent noirs et opaques, devenir transparents, et même se peindre de différentes couleurs, ou former des anneaux concentriques et coloész, ou des iris sur leur surface, et d’autres corps qu’on a d’abord vu transparens ou colorez, devenir noirs et obscurs ; ces changements ne sont pas réels, et ces apparences ne dépendent que de l’obliquité sous laquelle a lumière tombe sur ces corps, et de la hauteur du plan dans lequel ils se trouvent.

Lorsqu’il y a dans une liqueur des corps qui se meuvent avec une grande vitesse, sur-tout lorsque ces corps sont à la surface, ils forment par leur mouvement une espèce de sillon dans la liqueur, qui parait suivre le corps en mouvement, et qu’on serait porté à prendre pour une queue ; cette apparence m’a trompé quelquefois dans les commencemens, et j’ai reconnu bien clairement mon erreur, lorsque ces petits corps venaient à en rencontrer d’autres qui les arrêtaient, car alors il n’y avoit plus aucune apparence de queue. 

 

Ce sont-là les petites remarques que j’ai faites, et que j’ai cru devoir communiquer à ceux qui voudraient faire usage du microscope sur les liqueurs.

 

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11 mars 2012 7 11 /03 /mars /2012 07:42

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Aujourd'hui, faisons appel à M. Needham et son microscope. En effet, Buffon semble voir des animaux spermatiques partout...

 

 

CHAPITRE VI.

Expériences au sujet de la génération.

 

 

Mon premier soupçon fut que les animaux spermatiques qu’on voyait dans la semence de tous les mâles, pouvoient bien n’être que ces parties organiques, et voici comment je raisonnais. Si tous les animaux et les végétaux contiennent une infinité de parties organiques vivantes, on doit trouver ces mêmes parties organiques dans leur semence, et on doit les y trouver en bien plus grande quantité que dans aucune autre substance, soit animale, soit végétale, parce que la semence n’étant que l’extrait de tout ce qu’il y a de plus analogue à l’individu et de plus organique, elle doit contenir un très-grand nombre de molécules organiques, et les animalcules qu’on voit dans la semence des mâles ne sont peut-être que ces mêmes molécules organiques vivantes, ou du moins ils ne sont que la première réunion ou le premier assemblage de ces molécules ; mais si cela est, la semence de la femelle doit contenir, comme celle du mâle, des molécules organiques vivantes et à peu près semblables à celles du mâle, et l’on doit par conséquent y trouver, comme dans celle du mâle, des corps en mouvement, des animaux spermatiques ; et de même, puisque les parties organiques vivantes sont communes aux animaux et aux végétaux, on doit aussi les trouver dans les semences des plantes, dans le nectareum, dans les étamines, qui sont les parties les plus substantielles de la plante, et qui contiennent les molécules organiques nécessaires à la reproduction. 

 

Je songeai donc sérieusement à examiner au microscope les liqueurs séminales des mâles et des femelles, et les germes des plantes, et je fis sur cela un plan d’expériences : je pensai en même temps que le réservoir de la semence des femelles pouvoit bien être la cavité du corps glanduleux, dans laquelle Valisnieri et les autres avaient inutilement cherché l’œuf : après avoir réfléchi sur ces idées pendant plus d’un an, il me parut qu’elles étaient assez fondées pour mériter d’être suivies ; enfin je me déterminai à entreprendre une suite d’observations et d’expériences qui demandoit beaucoup de temps. 

 

J’avais fait connaissance avec M. Needham, fort connu de tous les Naturalistes par les excellentes observations microscopiques qu’il a fait imprimer en 1745. Cet habile homme, si recommandable par son mérite, m’avait été recommandé par M. Folkes Président de la Société royale de Londres ; m’étant lié d’amitié avec lui, je crus que je ne pouvais mieux faire que de lui communiquer mes idées, et comme il avoit un excellent microscope, plus commode et meilleur qu’aucun des miens, je le priai de me le prêter pour faire mes expériences ; je lui lu toute la partie de mon ouvrage qu’on vient de voir, et en même temps je lui dis que je croyais avoir trouvé le vrai réservoir de la semence dans les femelles, que je ne doutais pas que la liqueur contenue dans la cavité du corps glanduleux ne fut la vraie liqueur séminale des femelles, que j’étais persuadé qu’on trouverait dans cette liqueur, en l’observant au microscope, des animaux spermatiques, comme dans la semence des mâles, et que j’étais très fort porté à croire qu’on trouverait aussi des corps en mouvement dans les parties les plus substantielles des végétaux, comme dans tous les germes des amandes des fruits, dans le nectareum, etc. et qu’il y avoit grande apparence que ces animaux spermatiques qu’on avoit découverts dans les liqueurs séminales du mâle, n’étaient que le premier assemblage des parties organiques qui devaient être en bien plus grand nombre dans cette liqueur que dans toutes les autres substances qui composent le corps animal. 

M. Needham me parut faire cas de ces idées, et il eut la bonté de me prêter son microscope, il voulut même être présent à quelques unes de mes observations. 

 

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3 mars 2012 6 03 /03 /mars /2012 08:32

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Aujourd'hui, terminons le long chapitre V avec un ultime débat entre l'oeuf féminin et le ver spermatique masculin...

 

 

HISTOIRE NATURELLE.

HISTOIRE DES ANIMAUX.

 

CHAPITRE V.

Exposition des Systèmes sur la génération.

 

Une troisième difficulté contre ces deux systèmes, c’est la ressemblance des enfants, tantôt au père, tantôt à la mère, et quelquefois à tous les deux ensemble, et les marques évidentes des deux espèces dans les mulets et dans les animaux mi-partis. Si le ver spermatique de la semence du père doit être le fœtus, comment se peut-il que l’enfant ressemble à la mère ? et si le fœtus est préexistant dans l’œuf de la mère, comment se peut-il que l’enfant ressemble à son père ? et si le ver spermatique d’un cheval ou l’œuf d’une ânesse contient le fœtus, comment se peut-il que le mulet participe de la nature du cheval et de celle de l’ânesse ?

 

Ces difficultés générales, qui sont invincibles, ne sont pas les seules qu’on puisse faire contre ces systèmes, il y en a de particulières qui ne sont pas moins fortes ; et pour commencer par le système des vers spermatiques, ne doit-on pas demander à ceux qui les admettent et qui imaginent que ces vers se transforment en homme, comment ils entendent que se fait cette transformation, et leur objecter que celle des insectes n’a et ne peut avoir aucun rapport avec celle qu’ils supposent ? car le ver qui doit devenir mouche, ou la chenille qui doit devenir papillon, passe par un état mitoyen, qui est celui de la chrysalide, et lorsqu’il sort de la chrysalide, il est entièrement formé, il a acquis sa grandeur totale et toute la perfection de sa forme, et il est dès-lors en état d’engendrer ; au lieu que dans la prétendue transformation du ver spermatique en homme, on ne peut pas dire qu’il y ait un état de chrysalide, et quand même on en supposerait un pendant les premiers jours de la conception, pourquoi la production de cette chrysalide supposée n’est-elle pas un homme adulte et parfait, et qu’au contraire ce n’est qu’un embryon encore informe auquel il faut un nouveau développement ? on voit bien que l’analogie est ici violée, et que bien-loin de confirmer cette idée de la transformation du ver spermatique, elle la détruit lorsqu’on prend la peine de l’examiner.

 

D’ailleurs le ver qui doit se transformer en mouche vient d’un œuf, cet œuf est le produit de la copulation des deux sèxes, de la mouche mâle et de la mouche femelle, et il renferme le fœtus ou le ver qui doit ensuite devenir chrysalide, et arriver enfin à son état de perfection, à son état de mouche, dans lequel seul l’animal a la faculté d’engendrer, au lieu que le ver spermatique n’a aucun principe de génération, il ne vient pas d’un œuf ; et quand même on accorderait que la semence peut contenir des œufs d’où sortent les vers spermatiques, la difficulté restera toujours la même ; car ces œufs supposés n’ont pas pour principe d’existence la copulation des deux sèxes, comme dans les insectes, par conséquent la production supposée, non plus que le développement prétendu des vers spermatiques, ne peuvent être comparés à la production et au développement des insectes, et bien-loin que les partisans de cette opinion puissent tirer avantage de la transformation des insectes, elle me parait au contraire détruire le fondement de leur explication.

 

Lorsqu’on fait attention à la multitude innombrable des vers spermatiques, et au très-petit nombre de fœtus qui en résulte, et qu’on oppose aux Physiciens prévenus de ce système la profusion énorme et inutile qu’ils sont obligez d’admettre, ils répondent, comme je l’ai dit, par l’exemple des plantes et des arbres, qui produisent un très-grand nombre de graines assez inutilement pour la propagation ou la multiplication de l’espèce, puisque de toutes ces graines il n’y en a que fort peu qui produisent des plantes et des arbres, et que tout le reste semble être destiné à l’engrais de la terre, ou à la nourriture des animaux ; mais cette comparaison n’est pas tout-à-fait juste, parce qu’il est de nécessité absolue que tous les vers spermatiques périssent, à l’exception d’un seul, au lieu qu’il n’est pas également nécessaire que toutes les graines périssent, et que d’ailleurs en servant de nourriture à d’autres corps organisés, elles servent au développement et à la reproduction des animaux lorsqu’elles ne deviennent pas elles-mêmes des végétaux, au lieu qu’on ne voit aucun usage des vers spermatiques, aucun but auquel on puisse rapporter leur multitude prodigieuse : au reste, je ne fais cette remarque que pour rapporter tout ce qu’on a dit ou pû dire sur cette matière, car j’avoue qu’une raison tirée des causes finales n’établira ni ne détruira jamais un système en Physique.

 

Une autre objection que l’on a faite contre l’opinion des vers spermatiques, c’est qu’ils semblent être en nombre assez égal dans la semence de toutes les espèces d’animaux, au lieu qu’il paraitrait naturel que dans les espèces où le nombre des fœtus est fort abondant, comme dans les poissons, les insectes, etc. le nombre des vers spermatiques fût aussi fort grand ; et il semble que dans les espèces où la génération est moins abondante, comme dans l’homme, les quadrupèdes, les oiseaux, etc. le nombre des vers dût être plus petit ; car s’ils sont la cause immédiate de la production, pourquoi n’y a-t-il aucune proportion entre leur nombre et celui des fœtus ? d’ailleurs, il n’y a pas de différence proportionnelle dans la grandeur de la plûpart des espèces de vers spermatiques, ceux des gros animaux sont aussi petits que ceux des plus petits animaux ; le cabillau et l’éperlan ont des animaux spermatiques également petits ; ceux de la semence d’un rat et ceux de la liqueur séminale d’un homme sont à peu près de la même grosseur, et lorsqu’il y a de la différence dans la grandeur de ces animaux spermatiques, elle n’est point relative à la grandeur de l’individu ; le calmar, qui n’est qu’un poisson assez petit, a des vers spermatiques plus de cent mille fois plus gros que ceux de l’homme ou du chien, autre preuve que ces vers ne sont pas la cause immédiate et unique de la génération.

 

Les difficultés particulières qu’on peut faire contre le système des œufs, sont aussi très considérables : si le fœtus est préexistant dans l’œuf avant la communication du mâle et de la femelle, pourquoi dans les œufs que la poule produit sans avoir eu le coq, ne voit-on pas le fœtus aussi-bien que dans les œufs qu’elle produit après la copulation avec le coq ? Nous avons rapporté ci-devant les observations de Malpighi, faites sur des œufs frais sortant du corps de la poule, et qui n’avaient pas encore été couvés, il a toûjours trouvé le fœtus dans ceux que produisaient les poules qui avoient reçu le coq, et dans ceux des poules vierges ou séparées du coq depuis long temps, il n’a jamais trouvé qu’une mole dans la cicatricule ; il est donc bien clair que le fœtus n’est pas préexistant dans l’œuf, mais qu’au contraire il ne s’y forme que quand la semence du mâle l’a pénétré. 

Une autre difficulté contre ce système, c’est que non seulement on ne voit pas le fœtus dans les œufs des ovipares avant la conjonction des sèxes, mais même on ne voit pas d’œufs dans les vivipares : les Physiciens qui prétendent que le ver spermatique est le fœtus sous une enveloppe, sont au moins assurés de l’existence des vers spermatiques, mais ceux qui veulent que le fœtus soit préexistant dans l’œuf, non seulement imaginent cette préexistence, mais même ils n’ont aucune preuve de l’existence de l’œuf, au contraire il y a probabilité presqu’équivalente à la certitude, que ces œufs n’existent pas dans les vivipares, puisqu’on a fait des milliers d’expériences pour tâcher de les découvrir, et qu’on n’a jamais pû les trouver.

 

Quoique les partisans du système des œufs ne s’accordent point au sujet de ce que l’on doit regarder comme le vrai œuf dans les testicules des femelles, ils veulent cependant tous que la fécondation se fasse immédiatement dans ce testicule qu’ils appellent l’ovaire, sans faire attention que si cela étoit, on trouveroit la plupart des fœtus dans l’abdomen, au lieu de les trouver dans la matrice ; car le pavillon, ou l’extrémité supérieure de la trompe étant, comme l’on sait, séparée du testicule, les prétendus œufs doivent tomber souvent dans l’abdomen, et on y trouveroit souvent des fœtus : or on sait que ce cas est extrêmement rare, je ne sais pas même s’il est vrai que cela soit jamais arrivé par l’effet que nous supposons, et je pense que les fœtus qu’on a trouvés dans l’abdomen, étaient sortis, ou des trompes de la matrice, ou de la matrice même, par quelqu’accident.


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25 février 2012 6 25 /02 /février /2012 07:09

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Aujourd'hui, encore et toujours la même énigme. Qui de la femme ou de l'homme est à l'origine de la vie ? Buffon rend compte dans ce passage de l'avis d'autres auteurs sur le ver spermatique...

 

 

HISTOIRE NATURELLE.

HISTOIRE DES ANIMAUX.

 

CHAPITRE V.

Exposition des Systèmes sur la génération.

 

 

Leeuwenhoek, Andry et plusieurs autres s’opposèrent donc de toutes leurs forces au système des œufs ; ils avaient découvert dans la semence de tous les mâles des animalcules vivans, ils prouvaient que ces animalcules ne pouvaient pas être regardés comme des habitants de cette liqueur, puisque leur volume était plus grand que celui de la liqueur même, que d’ailleurs on ne trouvait rien de semblable ni dans le sang, ni dans les autres liqueurs du corps des animaux ; ils disaient que les femelles ne fournissant rien de pareil, rien de vivant, il était évident que la fécondité qu’on leur attribuait, appartenait au contraire aux mâles ; qu’il n’y avait que dans la semence de ceux-ci où l’on vît quelque chose de vivant, que ce qu’on y voyait, était de vrais animaux, et que ce fait tout seul avançait plus l’explication de la génération que tout ce qu’on avait imaginé auparavant, puisqu’en effet ce qu’il y a de plus difficile à concevoir dans la génération, c’est la production du vivant, que tout le reste est accessoire, et qu’ainsi on ne pouvait pas douter que ces petits animaux ne sussent destinés à devenir des hommes ou des animaux parfaits de chaque espèce ; et lorsqu’on opposait aux partisans de ce système, qu’il ne paroissait pas naturel d’imaginer que de plusieurs millions d’animalcules, qui tous pouvaient devenir un homme, il n’y en eût qu’un seul qui eût cet avantage 

Lorsqu’on leur demandait pourquoi cette profusion inutile de germes d’hommes, ils répondaient que c’était la magnificence ordinaire de la Nature, que dans les plantes et dans les arbres on voyait bien que de plusieurs millions de graines qu’ils produisent naturellement, il n’en réussit qu’un très petit nombre, et qu’ainsi on ne devait point être étonné de celui des animaux spermatiques, quelque prodigieux qu’il fût. 

Lorsqu’on leur objectait la petitesse infinie du ver spermatique, comparé à l’homme, ils répondaient par l’exemple de la graine des arbres, de l’orme, par exemple, laquelle comparée à l’individu parfait est aussi fort petite, et ils ajoutaient avec assez de fondement, des raisons métaphysiques, par  lesquelles ils prouvoient que le grand et le petit n’étant que des relations, le passage du petit au grand ou du grand au petit s’exécute par la Nature avec encore plus de facilité que nous n’en avons à le concevoir.

D’ailleurs, disaient-ils, n’a-t-on pas des exemples très fréquents de transformation dans les insectes ? ne voit-on pas de petits vers aquatiques devenir des animaux aîlés, par un simple dépouillement de leur enveloppe, laquelle cependant était leur forme extérieure et apparente ? les animaux spermatiques par une pareille transformation ne peuvent-ils pas devenir des animaux parfaits ? Tout concourt donc, concluaient-ils, à favoriser ce système sur la génération, et à faire rejeter le système des œufs ; et si l’on veut absolument, disaient quelques-uns, que dans les femelles des vivipares il y ait des œufs comme dans celles des ovipares, ces œufs dans les unes et dans les autres ne seront que la matière nécessaire à l’accroissement du ver spermatique, il entrera dans l’œuf par le pédicule qui l’attachait à l’ovaire, il y trouvera une nourriture préparée pour lui, tous les vers qui n’auront pas été assez heureux pour rencontrer cette ouverture du pédicule de l’œuf, périront, celui qui seul aura enfilé ce chemin, arrivera à sa transformation : c’est par cette raison qu’il existe un nombre prodigieux de ces petits animaux, la difficulté de rencontrer un œuf et ensuite l’ouverture du pédicule de cet œuf, ne peut être compensée que par le nombre infini des vers ; il y a un million, si l’on veut, à parier contre un, qu’un tel ver spermatique ne rencontrera pas le pédicule de l’œuf, mais aussi il y a un million de vers ; dès lors il n’y a plus qu’un à parier contre un que le pédicule de l’œuf sera enfilé par un de ces vers ; et lorsqu’il y est une fois entré et qu’il s’est logé dans l’œuf, un autre ne peut plus y entrer, parce que, disoient-ils, le premier ver bouche entièrement le passage, ou bien il y a une soupape à l’entrée du pédicule qui peut jouer lorsque l’œuf n’est pas absolument plein, mais lorsque le ver a achevé de remplir l’œuf, la soupape ne peut plus s’ouvrir, quoique poussée par un second ver ; cette soupape d’ailleurs est fort bien imaginée, parce que s’il prend envie au premier ver de ressortir de l’œuf, elle s’oppose à son départ, il est obligé de rester et de se transformer ; le ver spermatique est alors le vrai fœtus, la substance de l’œuf le nourrit, les membranes de cet œuf lui servent d’enveloppe, et lorsque la nourriture contenue dans l’œuf commence à lui manquer, il s’applique à la peau intérieure de la matrice et tire ainsi sa nourriture du sang de la mère, jusqu’à ce que par son poids et par l’augmentation de ses forces il rompe enfin ses liens pour venir au monde.

Par ce système ce n’est plus la première femme qui renfermait toutes les races passées, présentes et futures, mais c’est le premier homme qui en effet contenait toute sa postérité ; les germes préexistants ne sont plus des embryons sans vie renfermés comme de petites statues dans des œufs contenus à l’infini les uns dans les autres, ce sont de petits animaux, de petits homoncules organisés et actuellement vivans, tous renfermez les uns dans les autres, auxquels il manque rien, et qui deviennent des animaux parfaits et des hommes par un simple développement aidé d’une transformation semblable à celle que subissent les insectes avant que d’arriver à leur état de perfection.

 

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18 février 2012 6 18 /02 /février /2012 13:10

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Aujourd'hui, poursuivons avec les spermatozoïdes...

 

 

HISTOIRE NATURELLE.

HISTOIRE DES ANIMAUX.

 

CHAPITRE V.

Exposition des Systèmes sur la génération.

 

 

Ceux qui prirent la peine de répéter les observations de Leeuwenhoek, les trouvèrent assez conformes à la vérité ; mais il y en eut qui voulurent encore enchérir sur ses découvertes, et Dalenpatius ayant observé la liqueur séminale de l’homme, prétendit non seulement y avoir trouvé des animaux semblables aux têtards qui doivent devenir des grenouilles, dont le corps lui parut à peu près gros comme un grain de froment, dont la queue était quatre ou cinq fois plus longue que le corps, qui se mouvaient avec une grande agilité et frappaient avec la queue la liqueur dans laquelle ils nageaient, mais, chose plus merveilleuse, il vit un de ces animaux se développer ou plutôt quitter son enveloppe ; ce n’étoit plus un animal, c’était un corps humain, dont il distingua très bien, dit-il, les deux jambes, les deux bras, la poitrine et la tête, à laquelle l’enveloppe servait de capuchon.

 

Mais par les figures mêmes que cet auteur a données de ce prétendu embryon qu’il a vu sortir de son enveloppe, il est évident que le fait est faux ; il a cru voir ce qu’il dit, mais il s’est trompé, car cet embryon, tel qu’il le décrit, aurait été plus formé au sortir de son enveloppe et en quittant sa condition de ver spermatique, qu’il ne l’est en effet au bout d’un mois ou de cinq semaines dans la matrice même de la mère ; aussi cette observation de Dalenpatius, au lieu d’avoir été confirmée par d’autres observations, a été rejetée de tous les Naturalistes, dont les plus exacts et les plus exercés à observer, n’ont vu dans cette liqueur de l’homme que de petits corps ronds ou oblongs, qui paraissaient avoir de longues queues, mais sans autre organisation extérieure, sans membres, comme sont aussi ces petits corps dans la semence de tous les autres animaux.

 

...

 

 Hippocrate dans son traité de Diœta, paroît insinuer aussi que les semences d’animaux sont remplies d’animalcules, Démocrite parle de certains vers qui prennent la figure humaine, Aristote dit que les premiers hommes sortirent de la terre sous la forme de vers ; mais ni l’autorité de Platon, d’Hippocrate, de Démocrite et d’Aristote, ni l’observation de Dalenpatius ne feront recevoir cette idée que ces vers spermatiques sont de petits hommes cachez sous une enveloppe, car elle est évidemment contraire à l’expérience et à toutes les autres observations.

 

Valisnieri et Bourguet, que nous avons cités, ayant fait ensemble des observations sur la semence d’un lapin, y virent de petits vers dont l’une des extrémités était plus grosse que l’autre, ils étoient fort vifs, ils partoient d’un endroit pour aller à un autre, et frappoient la liqueur de leur queue ; quelquefois ils s’élevaient, quelquefois ils s’abaissaient, d’autres fois ils se tournaient en rond et se contournaient comme des serpents.

 

M. Andry ayant fait des observations sur ces vers spermatiques de l’homme, prétend qu’ils ne se trouvent que dans l’âge propre à la génération, que dans la première jeunesse et dans la grande vieillesse ils n’existent point, que dans les sujets incommodés de maladies vénériennes on n’en trouve que peu, et qu’ils y sont languissants et morts pour la plupart, que dans les parties de la génération des impuissants on n’en voit aucun qui soit en vie ; que ces vers dans l’homme ont la tête, c’est-à-dire, l’une des extrémités, plus grosse, par rapport à l’autre extrémité, qu’elle ne l’est dans les autres animaux ; ce qui s’accorde, dit-il, avec la figure du fœtus et de l’enfant, dont la tête en effet est beaucoup plus grosse, par rapport au corps, que celle des adultes, et il ajoûte que les gens qui font trop d’usage des femmes, n’ont ordinairement que très-peu ou point du tout de ces animaux. 

 

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28 janvier 2012 6 28 /01 /janvier /2012 12:37

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Aujourd'hui, nous aborderons enfin le monde fascinant des spermatozoïdes, qui vivèrent bien cachés avant l'invention des premeirs microscopes...

 

HISTOIRE NATURELLE.

HISTOIRE DES ANIMAUX.

 

CHAPITRE V.

Exposition des Systèmes sur la génération.

 

 

Ce système des œufs, par lequel, comme l’on voit, on ne rend raison de rien, et qui est si mal fondé, aurait cependant emporté les suffrages unanimes de tous les Physiciens, si dans les premiers temps qu’on a voulu l’établir, on n’eût pas fait un autre système fondé sur la découverte des animaux spermatiques.

Cette découverte, qu’on doit à Leeuwenhoek et à Hartsoëker, a été confirmée par Andri, Valisnieri, Bourguet, et par plusieurs autres observateurs. Je vais rapporter ce qu’ils ont dit de ces animaux spermatiques qu’ils ont trouvé dans la liqueur séminale de tous les animaux mâles : ils sont en si grand nombre, que la semence parait en être composée en entier, et Leeuwenhoek prétend en avoir vu plusieurs milliers dans une goutte plus petite que le plus petit grain de sable. 


On les trouve, disent ces observateurs, en nombre prodigieux dans tous les animaux mâles, et on n’en trouve aucun dans les femelles, mais dans les mâles on les trouve, soit dans la semence répandue au dehors par les voies ordinaires, soit dans celle qui est contenue dans les vésicules séminales qu’on a ouvertes dans des animaux vivants. Il y en a moins dans la liqueur contenue dans les testicules, que dans celle des vésicules séminales, parce qu’apparemment la semence n’y est pas encore entièrement perfectionnée. Lorsqu’on expose cette liqueur de l’homme à une chaleur, même médiocre, elle s’épaissit, le mouvement de tous ces animaux cesse assez promptement ; mais si on la laisse refroidir, elle se délaie et les animaux conservent leur mouvement long-temps, et jusqu’à ce que la liqueur vienne à s’épaissir par le desséchement ; plus la liqueur est délayée, plus le nombre de ces animalcules parait s’augmenter, et s’augmente en effet au point qu’on peut réduire et décomposer, pour ainsi dire, toute la substance de la semence en petits animaux, en la mêlant avec quelque liqueur délayante, comme avec de  l’eau ; et lorsque le mouvement de ces animalcules est prêt à finir, soit à cause de la chaleur, soit par le dessèchement, ils paroissent se rassembler de plus près, et ils ont un mouvement commun de tourbillon dans le centre de la petite goutte qu’on observe, et ils semblent périr tous dans le même instant, au lieu que dans un plus grand volume de liqueur on les voit aisément périr successivement.

 

Ces animalcules sont, disent-ils, de différente figure dans les différentes espèces d’animaux, cependant ils sont tous longs, menus et sans membres, ils se meuvent avec rapidité et en tous sens ; la matière qui contient ces animaux, est, comme je l’ai dit, beaucoup plus pesante que le sang. De la semence de taureau a donné à Verrheyen par la chimie, d’abord du phlegme, ensuite une quantité assez considérable d’huile fétide, mais peu de sel volatil en proportion, et beaucoup plus de terre qu’il n’auroit cru. 

Cet auteur parait surpris de ce qu’en rectifiant la liqueur distillée il ne pût en tirer des esprits, et comme il était persuadé que la semence en contient une grande quantité, il attribue leur évaporation à leur trop grande subtilité ; mais ne peut-on pas croire avec plus de fondement qu’elle n’en contient que peu ou point du tout. 

 

La consistance de cette matière et son odeur n’annoncent pas qu’il y ait des esprits ardents, qui d’ailleurs ne se trouvent en abondance que dans les liqueurs fermentées ; et à l’égard des esprits volatils, on sait que les cornes, les os et les autres parties solides des animaux en donnent plus que toutes les liqueurs du corps animal. 

Ce que les Anatomistes ont donc appellé esprits séminaux, aura seminalis, pourroit bien ne pas exister, et certainement ce ne sont pas ces esprits qui agitent les particules qu’on voit se mouvoir dans les liqueurs séminales ; mais pour qu’on soit plus en état de prononcer sur la nature de la semence et sur celle des animaux spermatiques, nous allons rapporter les principales observations qu’on a faites sur ce sujet.

 

Leeuwenhoek ayant observé la semence du coq, y vit des animaux semblables par la figure aux anguilles de rivière, mais si petits, qu’il prétend que cinquante mille de ces animalcules n’égalent pas la grosseur d’un grain de sable ; dans la semence du rat, il en faut plusieurs milliers pour faire l’épaisseur d’un cheveu, etc. 

Cet excellent observateur était persuadé que la substance entière de la semence n’est qu’un amas de ces animaux : il a observé ces animalcules dans la semence de l’homme, des animaux quadrupèdes, des oiseaux, des poissons, des coquillages, des insectes ; ceux de la semence de la sauterelle sont longuets et fort menus, ils paraissent attachés, dit-il, par leur extrémité supérieure, et leur autre extrémité qu’il appelle leur queue, a un mouvement très-vif, comme serait celui de la queue d’un serpent dont la tête et la partie supérieure du corps seroient immobiles. 

Lorsqu’on observe la semence dans des temps où elle n’est pas encore parfaite, par exemple, quelque temps avant que les animaux cherchent à se joindre, il prétend avoir vu les mêmes animalcules, mais sans aucun mouvement, au lieu que quand la saison de leurs amours est arrivée, ces animalcules se remuent avec une grande vivacité.

 

Dans la semence de la grenouille mâle il les vit d’abord imparfaits et sans mouvement, et quelque temps après il les trouva vivants ; ils sont si petits qu’il en faut, dit-il, dix mille pour égaler la grosseur d’un seul œuf de la grenouille femelle ; au reste ceux qu’il trouva dans les testicules de la grenouille, n’étoient pas vivans, mais seulement ceux qui étoient dans la liqueur séminale en grand volume, où ils prenaient peu à peu la vie et le mouvement.

 

Dans la semence de l’homme et dans celle du chien, il prétend avoir vu des animaux de deux espèces, qu’il regarde, les uns comme mâles et les autres comme femelles, et ayant enfermé dans un petit verre de la semence de chien, il dit que le premier jour il mourut un grand nombre de ces petits animaux, que le second et le troisième jour il en mourut encore plus, qu’il en restait fort peu de vivants le quatrième jour, mais qu’ayant répété cette observation une seconde fois sur la semence du même chien, il y trouva encore au bout de sept jours des animalcules vivants, dont quelques-uns nageoient avec autant de vitesse qu’ils nagent ordinairement dans la semence nouvellement extraite de l’animal, et qu’ayant ouvert une chienne qui avoit été couverte trois fois par le même chien quelque temps avant l’observation, il ne pût apercevoir avec les yeux seuls, dans l’une des cornes de la matrice, aucune liqueur séminale du mâle, mais qu’au moyen du microscope il y trouva les animaux spermatiques du chien, qu’il les trouva aussi dans l’autre corne de la matrice, et qu’ils étoient en très grande quantité dans cette partie de la matrice qui est voisine du vagin, ce qui, dit-il, prouve évidemment que la liqueur séminale du mâle était entrée dans la matrice, ou du moins que les animaux spermatiques du chien y étaient arrivez par leur mouvement, qui peut leur faire parcourir quatre ou cinq pouces de chemin en une demi-heure. 

 

Dans la matrice d’une femelle de lapin qui venait de recevoir le mâle, il observa aussi une quantité infinie de ces animaux spermatiques du mâle, il dit que le corps de ces animaux est rond, qu’ils ont de longues queues, et qu’ils changent souvent de figure, surtout lorsque la matière humide dans laquelle ils nagent, s’évapore et se dessèche.

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