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Bienvenue à toutes et à tous. Je suis Gulzar Joby, auteur de Science-fiction. Retrouvez mes parutions, mon carnet de notes et les autres rubriques de mon blog.

Antonio Perez, un auteur de SF méconnu

Antonio Perez, un auteur méconnu

 

Bonjour à toutes et à tous. 

 

Petit article aujourd’hui, plutôt une biographie sommaire d’un très rare auteur de SF que j’ai découvert par hasard sur des sites hispaniques, sans avoir la possibilité de le lire, malheureusement. J’ai la chance de connaître un peu d’espagnol, j’ai donc pu récolter quelques informations intéressantes. 

 

marcello perez

 

Sans être certainement un génie, Antonio Perez  était à coup sûr un auteur de talent ; en tous cas intéressant, provocateur mais sans être un visionnaire éclairé non plus. Cet auteur mexicain relevait plus de la révolte, de la haine irrépréhensible pour toute forme d’oppression. 

« La Muerte », voilà bien le centre de son œuvre, jamais passée à la postérité. 

 

Né au début du vingtième siècle d’un mariage entre une émigré italienne et un mexicain de souche au métier inconnu, Antonio Perez semble être né à Mexico, ou à proximité, la date restant imprécise.  

Ses écrits ne raconte rien de son enfance, de son adolescence, certainement modeste. Le plus frappant, certainement l’un des premiers signes de sa révolte, est son refus obstiné d’émigrer pour les USA, qualifié dans l’un de ses dernières nouvelles des années 50, El ogre en la Cadillac, « d’immondices spatiaux-génocidaires ». 

 

Fervent nationaliste, Antonio Perez a toujours refusé de mettre en scène d’autres personnages que Mexicains, refusant l’Impérialisme sous toutes ses formes. 

C’est donc une SF hispanique et sud américaine, certainement peuplée d’hommes moustachus, d’indiens, de femmes au sang chaud, qui ne nous est pas parvenue. 

Plus excitant encore, Antonio Perez intégrait différentes langues indiennes à ses récits, composant un langage en phase avec les justes revendications de ces peuples décimés par l’arrivée des européens colonisateurs. 

Ce qui expliquerait logiquement le très peu de succès qu’il eut de son vivant. L’élite intellectuelle mexicaine ou nord-américaine, pourtant friande de SF, n’était pas encore prête à admettre en ces années de ségrégation d’après-guerre que la culture indienne puisse avoir sa place dans une quelconque création…

Démarche radicale donc qui condamna Antonio Perez à vivre dans la pauvreté et l‘indifférence, malgré son emploi de gardien de square dans la banlieue de Mexico qu’il semble avoir conservé très tard dans sa vie. 

 

D’un pessimisme extrême, Antonio Perez  n’aura eu de cesse de fustiger le vingtième siècle, inventant de plus terribles siècles encore dans le futur plus ou moins éloigné.  Pessimisme qui se retrouve dans l’un de ses premiers courts romans, sans doute le meilleur, Ninos muertos qui décrit la résistance acharnée d’enfants supra conscients refusant de venir au monde. 

Les scènes où les adultes les torturent pour les obliger à naître atteignaient vraisemblablement avant l’heure les sommets horrifiques de Georges Romero, David Cronenberg et John Carpenter…

Tiré seulement à quelques centaines d’exemplaires, cet ouvrage a semble-t-il disparu corps et bien… 

La comparaison est osée, mais les articles que j’ai pu trouvé dans le fanzina mexicain de l’époque évoquent une comparaison avec Mort à crédit de Céline. Par l’utilisation de l’argot populaire, par la réinvention d’une langue sortant de l’esthétique bourgeoise ; destinée non à atteindre des sommets de vulgarité mais bien ce qu‘un chroniqueur de l‘époque, visiblement grand amateur de Antonio Perez , qualifiait de « langue vomitive ». J’espère avoir traduit l’expression au mieux. 

 

C’est dire que ce court roman Ninos muertos manque à l’Histoire mondial du genre. Il serait certainement intéressant de pouvoir le lire, sans pour autant en faire non plus le roman du vingtième siècle… 

 

Suivront au cours des années 40 et 50 un petit nombre de nouvelles et de romans à petit tirage, toujours aussi courts et virulents ; Muerte artificial, Zapata III, Oppenheimer hijo de puta, Révolucion del doble cerebro, la grande matanza de los cientificos, Muerte en la mano. 

Une méfiance extrême vis-à-vis des réalisations de la Science domine ses écrits. Lui prêtant des buts inavouables, Antonio Perez tentait de propager dans l’esprit du lecteur une révulsion envers la Science. Les scientifiques eux-mêmes sont très souvent massacrés par la population en révolte. 

Le scientifique n’était pour Antonio Perez qu’un être servile, bas, sans empathie aucune pour son semblable, au service de puissances occultes manipulant l’Humanité ; quasiment un monstre sanguinaire, une entité sortie tout droit des écrits de Lovecraft converti au rationalisme. 

Je vous cite un extrait d’une chronique, qui je crois est parlant : « L’enfer est la soif de savoir au service de la domination sur les êtres. Le paradis, lui, n’existe pas, l’Humanité ne parvenant jamais à le rendre palpable. » 

 

La fin de sa vie est assez triste, pour ne pas dire affligeante. En effet, ne publiant apparemment plus nulle part, Antonio Perez s’est mis à envoyer des lettres d’insultes à nombre d’auteurs importants des années 50 et 60. 

Sans doute déjà sénile, Antonio Perez envoya surtout plusieurs dizaines de lettres retrouvées récemment dans la correspondance d’Isaac Asimov, correspondance intégralement conservée par le grand maître. L’auteur Mexicain l’accusait de plagiat à propos de sa série de textes sur les robots. 

Effectivement, il semblerait que dans une courte nouvelle de jeunesse, El mundo de los perezosos, Antonio Perez ait mentionné une loi concernant les robots, loi unique « tu ne toucheras pas aux femmes mariées », avant de ne plus jamais écrire sur ce sujet. 

Alors l’immense Asimov a-t-il lu cette nouvelle, parue dans un obscure fanzine de Chihuahua avant de créer ses fameuses Trois Lois de la Robotique ? C’est sans doute très peu probable…

La haine de l’Amérique, l’aigreur de ne pas avoir été reconnu à sa juste valeur auront troublé l’esprit du vieil homme qu’était alors Antonio Perez, disparu au tout début des années 70.  

 

Voilà donc tout ce que j’ai pu découvrir  sur cet auteur méconnu. C’est beaucoup et bien peu à la fois, puisque ses ouvrages sont à ma connaissance introuvables en Europe, sauf peut-être en Espagne, chez quelques expatriés sud-américains ayant conservés les précieux ouvrages.

Ou alors par miracle chez les bouquinistes… 

 

Si jamais vous avez lu ou possédé un livre de cet auteur, notamment donc le fameux Ninos Muertos, n’hésitez pas à m’envoyer une chronique ou des informations complémentaires ; je ferai suivre sur le blog 36. 

 

Gulzar

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