Il faut consommer
La chapelle amphibie quitta le quai dans de grandes gerbes d’eau, éclaboussant les canots scolaires accostés à un bateau cantine de huit étages. Avec l’élévation des mers au siècle dernier, Belém n’avait pas eu d’autre choix que de devenir une ville à moitié flottante, composé de quartiers changeant de place au gré des besoins ou des tempêtes.
Rapidement, Wictorius se perdit et fut obligé d’adresser la parole à des inconnus pour demander sa route dans ce réseau démentiel de canaux. Tous ses implants de localisation étaient dépassés…
À ses côtés, Beatrix commençait un nouveau tricot, avec une maille d’une rare complexité.
- Sommes-nous perdus ?
- Certainement pas ! Nous allons rejoindre au plus vite le rio Pará ! Belém n’a pas de secrets pour moi.
Au cours des journées à venir, ils remonteraient la baie de Guajará, le long de la rive droite de l’embouchure de l’Amazone pour s’enfoncer dans la forêt sauvage ; là où de farouches indiens continuaient de vivre comme leurs ancêtres, là où la modernité des grandes villes n’était encore qu’un songe. La Greffe Noire n’avait qu’à bien se tenir !
À la limite de la vitesse autorisée, Wictorius faisait face à une circulation effrayante, des pédalos taxis aux majestueuses jonques Hongkongaises dernier cri en passant par des tacots tombant en ruines et des bus surchargés à roues à aubes.
Soudain, une sirène retentit et Wictorius se retrouva bloqué par un véhicule automatique de la Polícia Comercial.
%%% veuillez présenter pour vérification les preuves de vos achats en ville.
- Mais bien sûr…
Farfouillant le tableau de bord, Beatrix retrouva la note de la supérette où Dolph avait fait les courses et la présenta à l’œil mobile du véhicule.
%%% tout à fait insuffisant. vous devez consommer pour au moins cinq cent brazols. telle est la dure loi de Belém.
La suite lundi !