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2 avril 2011 6 02 /04 /avril /2011 09:02

banniere buffon internet

Après avoir parcouru le tout premier tome des oeuvres de Buffon abordons logiquement le second, qui s'annonce passionnant !


HISTOIRE NATURELLE.

HISTOIRE DES ANIMAUX.
CHAPITRE PREMIER.

Comparaison des Animaux et des Végétaux.


"  Dans la foule d’objets que nous présente ce vaste globe dont nous venons de faire la description, dans le nombre infini des différentes productions dont sa surface est couverte et peuplée, les animaux tiennent le premier rang, tant par la conformité qu’ils ont avec nous, que par la supériorité que nous leur connaissons sur les êtres végétales ou inanimés.
Les animaux ont par leurs sens, par leur forme, par leur mouvement, beaucoup plus de rapports avec les choses qui les environnent, que n’en ont les végétaux ; ceux-ci par leur développement, par leur figure, par leur accroissement et par leurs différentes parties ont aussi un plus grand nombre de rapports avec les objets extérieurs, que n’en ont les minéraux ou les pierres, qui n’ont aucune sorte de vie ou de mouvement, et c’est par ce plus grand nombre de rapports que l’animal est réellement au dessus du végétal, et le végétal au dessus du minéral.

Nous-mêmes, à ne considérer que la partie matérielle de notre être, nous ne sommes au dessus des animaux que par quelques rapports de plus, tels que ceux que nous donnent la langue et la main ; et quoique les ouvrages du Créateur soient en eux-mêmes tous également parfaits, l’animal est, selon notre façon d’apercevoir, l’ouvrage le plus complet de la Nature, et l’homme en est le chef-d’œuvre.

En effet, que de ressorts, que de forces, que de machines et de mouvements sont renfermés dans cette petite partie de matière qui compose le corps d’un animal ! que de rapports, que d’harmonie, que de correspondance entre les parties ! combien de combinaisons, d’arrangements, de causes, d’effets, de principes, qui tous concourent au même but, et que nous ne connaissons que par des résultats si difficiles à comprendre, qu’ils n’ont cessé d’être des merveilles que par l’habitude
que nous avons prise de n’y point réfléchir !

Cependant, quelqu’admirable que cet ouvrage nous paraisse, ce n’est pas dans l’individu qu’est la plus grande merveille, c’est dans la succession, dans le renouvellement et dans la durée des espèces que la Nature paroît tout-à-fait inconcevable. Cette faculté de produire son semblable, qui réside dans les animaux et dans les végétaux, cette espèce d’unité toujours subsistante et qui parait éternelle, cette vertu procréatrice qui s’exerce perpétuellement sans se détruire jamais, est pour nous un mystère dont il semble qu’il ne nous est pas permis de sonder la profondeur.

Car la matière inanimée, cette pierre, cette argile qui est sous nos pieds, a bien quelques propriétés, son existence seule en suppose un très grand nombre, et la matière la moins organisée ne laisse pas que d’avoir, en vertu de son existence, une infinité de rapports avec toutes les autres parties de l’Univers. Nous ne dirons pas, avec quelques Philosophes, que la matière, sous quelque forme qu’elle soit, connaît son existence et ses facultés relatives ; cette opinion tient à une question de Métaphysique que nous ne nous proposons pas de traiter ici, il nous suffira de faire sentir que n’ayant pas nous-mêmes la connoissance de tous les rapports que nous pouvons avoir avec les objets extérieurs, nous ne devons pas douter que la matière inanimée n’ait infiniment moins de cette connoissance, et que d’ailleurs nos sensations ne ressemblant en aucune façon aux objets qui les causent, nous devons conclurre par analogie que la matière inanimée n’a ni sentiment, ni sensation, ni conscience d’existence, et que de lui attribuer quelques-unes de ces facultés, ce serait lui donner celle de penser, d’agir et de sentir à peu près dans le même ordre et de la même façon que nous pensons, agissons et sentons, ce qui répugne autant à la raison qu’à la religion.

Nous devons donc dire qu’étant formés de terre et composés de poussière, nous avons en effet avec la terre et la poussière des rapports communs qui nous lient à la matière en général, tels sont l’étendue, l’impénétrabilité, la pesanteur, etc. mais comme nous n’apercevons pas ces rapports purement matériels, comme ils ne font aucune impression au dedans de nous-mêmes, comme ils subsistent sans notre participation, et qu’après la mort ou avant la vie ils existent et ne nous affectent point du tout, on ne peut pas dire qu’ils fassent partie de notre être, c’est donc l’organisation, la vie, l’âme, qui fait proprement notre existence ; la matière considérée sous ce point de vue, en est moins le sujet que l’accessoire, c’est une enveloppe étrangère dont l’union nous est inconnue et la présence nuisible, et cet ordre de pensées qui constitue notre être, en est peut-être tout-à-fait indépendant. "


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25 mars 2011 5 25 /03 /mars /2011 08:11

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Aujourd'hui, nous évoquerons l'Atlantide, la Bretagne et tenterons de lire un peu de latin !

PREUVES DE LA THEORIE DE LA TERRE.
ARTICLE XIX.
Des changements de terres en mers, & de mers en terres.


" Cependant tous les changements que les fleuves occasionnent, sont assez lents, & ne peuvent devenir considérables qu’au bout d’une longue suite d’années ; mais il est arrivé des changements brusques & subits par les inondations & les tremblements de terre.
Les anciens Prêtres Égyptiens, 600 ans avant la naissance de Jésus Christ, assuraient, au rapport de Platon dans le Timée, qu’autrefois il y avoit une grande isle auprès des colonnes d’Hercule, plus grande que l’Asie & la Libye prises ensemble, qu’on appelloit Atlantides, que cette grande isle fut inondée & abimée sous les eaux de la mer après un grand tremblement de terre.

Traditur Atheniensis civitas restitisse olim innumeris hostium copiis quæ ex Atlantico mari profectæ, propè cunctam Europam Asiamque obsederunt ; tunc enim fretum illud navigabile, habens in ore & quasi vestibulo ejus insulam quas Herculis Columnas cognominant : ferturque insula illa Libyâ simul & Asia major fuisse, per quam ad alias proximas insulas patebat aditus, atque ex insulis ad omnem continentem è conspectu jacentem vero mari vicinam ; sed intrà os ipsum portus angusto sinu traditur, pelagus illud verum mare, terra quoque illa verè erat continens, &c. Post hæc ingenti terræ motu jugique diei unius & noctis illuvione factum est, ut terra dehiscens omnes illos bellicosos absorberet, & Atlantis insula sub vasto gurgite mergeretur. Plato in Timæo.

Cette ancienne tradition n’est pas absolument contre toute vraisemblance, les terres qui ont été absorbées par les eaux sont peut-être celles qui joignaient l’Irlande aux Açores, & celles-ci au continent de l’Amérique ; car on trouve en Irlande les mêmes fossiles, les mêmes coquillages & les mêmes productions marines que l’on trouve en Amérique, dont quelques-unes sont différentes de celles qu’on trouve dans le reste de l’Europe.

Eusèbe rapporte deux témoignages au sujet des déluges, dont l’un est de Melon, qui dit que la Syrie avait été autrefois inondée dans toutes les plaines ; l’autre est d’Abidenus, qui dit que du temps du Roi Sisithrus il y eut un grand déluge qui avait été prédit par Saturne. Plutarque de solertia animalium, Ovide & les autres Mythologistes parlent du déluge de Deucalion, qui s’est fait, dit-on, en Thessalie, environ 700 ans après le déluge universel.
On prétend aussi qu’il y en a eu un plus ancien dans l’Attique, du temps d’Ogiges, environ 230 ans avant celui de Deucalion.
Dans l’année 1095 il y eut un déluge en Syrie qui noya une infinité d’hommes.
En 1164 il y en eut un si considérable dans la Frise, que toutes les côtes maritimes furent sunmergées avec plusieurs milliers d’hommes.
En 1218 il y eut une autre inondation qui fit périr près de 400 000 hommes, aussi-bien qu’en 1530.
Il y a plusieurs autres exemples de ces grandes inondations, comme celle de 1604 en Angleterre, &c.

Une troisième cause de changement sur la surface du lobe sont les vents impétueux, non seulement ils forment des dunes & des collines sur les bords de la mer & dans le milieu des continents, mais souvent ils arrêtent & font rebrousser les rivières, ils changent la direction des fleuves, ils enlèvent les terres cultivées, les arbres, ils renversent les maisons, ils inondent, pour ainsi dire, des pays tout entiers ; nous avons un exemple de ces inondations de sable en France sur les côtes de Bretagne, l’histoire de l’Académie, année 1722, en fait mention dans les termes suivants.
"Aux environs de Saint-Paul de Léon en Basse-Bretagne, il y a sur la mer un canton qui avant l’an 1666 était habité & ne l’est plus à cause d’un sable qui le couvre jusqu’à une hauteur de plus de 20 pieds, & qui d’année en année s’avance & gagne du terrain. A compter de l’époque marquée il a gagné plus de six lieues, & il n’est plus qu’à une demi-lieue de Saint-Paul, de sorte que selon toutes les apparences il faudra abandonner la ville. Dans le pays submergé on voit encore quelques pointes de clochers & quelques cheminées qui sortent de cette mer de sable ; les habitants des villages enterrez ont eu du moins le loisir de quitter leurs maisons pour aller mendier.
C’est le vent d’est ou du nord qui avance cette calamité, il élève ce sable qui est très fin, & le porte en si grande quantité & avec tant de vitesse, que M. Deslandes à qui l’Académie doit cette observation, dit qu’en se promenant en ce pays-là pendant que le vent charriait, il était obligé de secouer de temps en temps son chapeau & son habit, parce qu’il les sentait appesantis : de plus quand ce vent est violent, il jette ce sable par dessus un petit bras de mer, jusque dans Roscof, petit port assez fréquenté par les vaisseaux étrangers ; le sable s’élève dans les rues de cette bourgade jusqu’à deux pieds, & on l’enlève par charretées. On peut remarquer en passant qu’il y a dans ce sable beaucoup de parties ferrugineuses qui se reconnaissent au couteau aimanté." "

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17 mars 2011 4 17 /03 /mars /2011 15:09

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Aujourd'hui, nous apprendrons avec effroi qu'autrefois, la France et l'Angleterre ne faisait qu'un...

PREUVES DE LA THEORIE DE LA TERRE.
ARTICLE XIX.
Des changements de terres en mers, & de mers en terres.

" L’une des principales causes des changements qui arrivent sur la terre, c’est le mouvement qu’elle a éprouvé de tout temps ; car dès la création il y a eu le soleil, la lune, la terre, les eaux, l’air, &c. dès-lors le flux & le reflux, le mouvement d’orient en occident, celui des vents & des courants se sont fait sentir, les eaux ont eu dès lors les mêmes mouvements que nous remarquons aujourd’hui dans la mer ; & quand même on supposerait que l’axe du globe aurait eu une autre inclinaison, & que les continents terrestres aussi-bien que les mer auraient eu une autre disposition, cela ne détruit point le mouvement du flux & du reflux, non plus que la cause & l’effet des vents ; il suffit que l’immense quantité d’eau qui remplit le vaste espace des mers, se soit trouvé rassemblée quelque part sur le globe de la terre, pour que le flux & le reflux, & les autres mouvements de la mer aient été produits.

Lorsqu’une fois on a commencé à soupçonner qu’il se pouvait bien que notre continent eut autrefois été le fond d’une mer, on se le persuade bientôt à n’en pouvoir douter ; d’un côté ces débris de la mer qu’on trouve partout,de l’autre la situation horizontale des couches de la terre, & enfin cette disposition des collines & des montagnes qui se correspondent, me paraissent autant de preuves convaincantes ; car en considérant les plaines, les vallées, les collines, on voit clairement que la surface de la terre a été figurée par les eaux ; en examinant l’intérieur des coquilles qui sont renfermées dans les pierres, on reconnaît évidemment que ces pierres se sont formées par le sédiment des eaux, puisque les coquilles sont remplies de la matière même de la pierre qui les environne ; & enfin en réfléchissant sur la forme des collines dont les angles saillants répondent toujours aux angles rentrants des collines opposées, on ne peut pas douter que cette direction ne soit l’ouvrage des courants de la mer : à la vérité depuis que notre continent est découvert, la forme de la surface a un peu changé, les montagnes ont diminué de hauteur, les plaines se sont élevées, les angles des collines sont devenus plus obtus, plusieurs matières entraînées par les fleuves se sont arrondies, il s’est formé des couches de tuf, de pierre molle, de gravier, &c. mais l’essentiel est demeuré, la forme ancienne se reconnaît encore, & je suis persuadé que tout le monde peut se convaincre par ses yeux de tout ce que nous avons dit à ce sujet, & que quiconque aura bien voulu suivre nos observations & nos preuves, ne doutera pas que la terre n’ait été autrefois sous les eaux de la mer, & que ce ne soit les courants de la mer qui aient donné à la surface de la terre la forme que nous voyons.

...

" Les habitants de Ceylan disent que leur isle a été séparée de la presqu’isle de l’Inde par une irruption de l’océan, & cette tradition populaire est assez vraisemblable ; on croit aussi que l’isle de Sumatra a été séparée de Malaye, le grand nombre d’écueils & de bancs de sable qu’on trouve entre deux semble le prouver. Les Malabares assurent que les isles Maldives faisaient partie du continent de l’Inde, & en général on peut croire que toutes les isles orientales ont été séparées des continents par une irruption de l’océan.

Il parait qu’autrefois l’isle de la Grande-Bretagne faisait partie du continent, & que l’Angleterre tenait à la France, les lits de terre & de pierre, qui sont les mêmes des deux côtés du pas de Calais, le peu de profondeur de ce détroit semblent l’indiquer : en supposant, dit le Docteur Wallis, comme tout parait l’indiquer, que l’Angleterre communiquait autrefois à la France par un isthme au dessous de Douvres & de Calais, les grandes mers des deux côtés battaient les côtes de cet isthme par un flux impétueux, deux fois en 24 heures ; la mer d’Allemagne, qui est entre l’Angleterre & la Hollande, frappait cet isthme du côté de l’est, & la mer de France du côté de l’ouest, cela suffit avec le temps pour user & détruire une langue de terre étroite, telle que nous supposons qu’était autrefois cet isthme : le flux de la mer de France agissant avec grande violence, non seulement contre l’isthme, mais aussi contre les côtes de France & d’Angleterre, doit nécessairement, par le mouvement des eaux, avoir enlevé une grande quantité de sable, de terre, de vase de tous les endroits contre lesquels la mer agissait ; mais étant arrêtée dans son courant par cet isthme, elle ne doit pas avoir déposé, comme on pourrait le croire, des sédiments contre l’isthme, mais elle les aura transportés dans la grande plaine qui forme actuellement le marécage de Romne, qui a quatorze milles de long sur huit de large ; car quiconque a vu cette plaine, ne peut pas douter qu’elle n’ait été autrefois sous les eaux de la mer, puisque dans les hautes marées elle serait encore en partie inondée sans les digues de Dimchurch.  "

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26 février 2011 6 26 /02 /février /2011 20:11

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Aujourd'hui, concluons l'article en nous rendant en Italie...

PREUVES DE LA THEORIE DE LA TERRE.
ARTICLE XVIII.
De l’effet des Pluies, des Marécages, des Bois souterrains, des Eaux souterraines.

" Dans la ville de Modène & à quatre milles aux environs, en quelqu’endroit qu’on fouille, lorsqu’on est parvenu à la profondeur de 63 pieds & qu’on a percé la terre à 5 pieds de profondeur de plus avec une tarrière, l’eau jaillit avec une si grande force, que le puits se remplit en fort peu de temps presque jusqu’au dessus, cette eau coule continuellement, & ne diminue ni n’augmente par la pluie ou par la sécheresse ; ce qu’il y a de remarquable dans ce terrain, c’est que lorsqu’on est parvenu à 14 pieds de profondeur, on trouve les décombrements & les ruines d’une ancienne ville, des rues pavées, des planchers, des maisons, différentes pièces de mosaïque ; après quoi on trouve une terre assez solide & qu’on croirait n’avoir jamais été rémuée, cependant au dessous on trouve une terre humide & mêlée de végétaux, & à 26 pieds des arbres tout entiers ; comme des noisetiers avec les noisettes dessus, & une grande quantité de branches & de feuilles d’arbres ; à 28 pieds on trouve une craie tendre mêlée de beaucoup de coquillages, & ce lit a 11 pieds d’épaisseur, après quoi on retrouve encore des végétaux, des feuilles & des branches, & ainsi alternativement de la craie & une terre mêlée de végétaux jusqu’à la profondeur de 63 pieds, à laquelle profondeur est un lit de sable mêlé de petit gravier & de coquilles semblables à celles qu’on trouve sur les côtes de la mer d’Italie : ces lits successifs de terre marécageuse & de craie se trouvent toujours dans le même ordre, en quelqu’endroit qu’on fouille, & quelquefois la tarrière trouve de gros troncs d’arbres qu’il faut percer, ce qui donne beaucoup de peine aux ouvriers ; on y trouve aussi des os, du charbon de terre, des cailloux & des morceaux de fer.

Ramazzini qui rapporte ces faits, croit que le golfe de Venise s’étendait autrefois jusqu’à Modène & au delà, & que par la succession des temps, les rivières, & peut-être les inondations de la mer ont formé successivement ce terrain.

Je ne m’étendrai pas davantage ici sur les variétés que présentent ces couches de nouvelle formation, il suffit d’avoir montré qu’elles n’ont pas d’autres causes que les eaux courantes ou stagnantes qui sont à la surface de la terre, & qu’elles ne sont jamais aussi dures, ni aussi solides que les couches anciennes qui se sont formées sous les eaux de la mer. "

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19 février 2011 6 19 /02 /février /2011 11:58

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Aujourd'hui, découvrons pourquoi les vallées sont pleines de rochers...

PREUVES DE LA THEORIE DE LA TERRE.
ARTICLE XVIII.
De l’effet des Pluies, des Marécages,

des Bois souterrains, des Eaux souterraines.


" Nous avons dit que les pluies & les eaux courantes qu’elles produisent, détachent continuellement du sommet & de la croupe des montagnes les sables, le serres, les graviers, &c. & qu’elles les entraînent dans les plaines, d’où les rivières & les fleuves en charrient une partie dans les plaines plus basses, & souvent jusqu’à la mer ; les plaines se remplissent donc successivement & s’élèvent peu à peu, & les montagnes diminuent tous les jours & s’abaissent continuellement, & dans plusieurs endroits on s’est aperçu de cet abaissement.

Joseph Blancanus rapporte sur cela des faits qui étaient de notoriété publique dans son temps, & qui prouvent que les montagnes s’étaient abaissées au point que l’on voyait des villages & des châteaux de plusieurs endroits, d’où on ne pouvait pas les voir autrefois.
Dans la province de Darby en Angleterre, le clocher du village Craih n’était pas visible en 1572 depuis une certaine montagne, à cause de la hauteur d’une autre montagne interposée, laquelle s’étend en Hopton & Wirksworth, & 80 ou 100 ans après on voyait ce clocher, & même une partie de l’église.
Le Docteur Plot donne un exemple pareil d’une montagne entre Sibbertost & Ashby dans la province de Northampton. Les eaux entraînent non seulement les parties les plus légères des montagnes, comme la terre, le sable, le gravier & les petites pierres, mais elles roulent même de très gros rochers, ce qui en diminue considérablement la hauteur ; en général, plus les montagnes sont hautes & plus leur pente est raide, plus les rochers y sont coupés à pic.

Les plus hautes montagnes du pays de Galles ont des rochers extrêmement droits & fort nus, on voit les copeaux de ces rochers (si on peut se servir de ce nom) en gros monceaux à leurs pieds ; ce sont les gelées & les eaux qui les séparent & les entraînent ; ainsi ce ne sont pas seulement les montagnes de sable & de terre que les pluies rabaissent, mais, comme l’on voit, elles attaquent les rochers les plus durs, & en entraînent les fragments jusque dans les vallées.
Il arriva dans la vallée de Nant-phrancon en 1685, qu’une partie d’un gros rocher qui ne portait que sur une base étroite, ayant été minée par les eaux, tomba & se rompit en plusieurs morceaux avec plus d’un millier d’autres pierres, dont la plus grosse fit en descendant une tranchée considérable jusque dans la plaine, où elle continua à cheminer dans une petite prairie, & traversa une petite rivière de l’autre côté de laquelle elle s’arrêta.

C’est à de pareils accidents qu’on doit attribuer l’origine de toutes les grosses pierres que l’on trouve ordinairement çà & là dans les vallées voisines des montagnes. On doit se souvenir, à l’occasion de cette observation, de ce que nous avons dit dans l’article précédent, savoir, que ces rochers & ces grosses pierres dispersées sont bien plus communes dans les pays dont les montagnes sont de sable & de grès, que dans ceux où elles sont de marbre & de glaise, parce que le sable qui sert de base au rocher, est un fondement moins solide que la glaise.
Pour donner une idée de la quantité de terre que les pluies détachent des montagnes & qu’elles entraînent dans les vallées, nous pouvons citer un fait rapporté par le Docteur Plot : il dit dans son Histoire Naturelle de Stafford, qu’on a trouvé dans la terre, à 18 pieds de profondeur, un grand nombre de pièces de monnoie frappées du temps d’Édouard IV, c’est-à-dire, 200 ans auparavant, en sorte que ce terrain, qui est marécageux, s’est augmenté d’environ un pied en onze ans, ou d’un pouce & un douzième par an.

On peut encore faire une observation semblable sur des arbres enterrés à 17 pieds de profondeur, au dessous desquels on a trouvé des médailles de Jules César ; ainsi les terres amenées du dessus des montagnes dans les plaines par les eaux courantes, ne laissent pas d’augmenter très considérablement l’élévation du terrain des plaines. "

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11 février 2011 5 11 /02 /février /2011 12:17

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Aujourd'hui, explorons donc les cavernes !

PREUVES DE LA THEORIE DE LA TERRE.
ARTICLE XVII.
Des Isles nouvelles, des Cavernes,

des Fentes perpendiculaires, &c.

" L’eau, comme on l’a vu, a produit les montagnes & formé la plupart des isles, le feu a élevé quelques collines & quelques isles, il en est de même des cavernes, des fentes, des ouvertures, des gouffres, &c. les unes ont pour origine les feux souterrains, & les autres les eaux, tant souterraines que superficielles.
Les cavernes se trouvent dans les montagnes, & peu ou point du tout dans les plaines : il y en a beaucoup dans les isles de l’Archipel, & dans plusieurs autres isles, & cela, parce que les isles ne sont en général, que des dessus de montagnes ; les cavernes se forment, comme les précipices, par l’affaissement des rochers, ou comme les abymes, par l’action du feu ; car pour faire d’un précipice ou d’un abîme une caverne, il ne faut qu’imaginer des rochers contrebutés & faisant voûte par dessus, ce qui doit arriver très souvent lorsqu’ils viennent à être ébranlés & déracinés.

Les cavernes peuvent être produites par les mêmes causes qui produisent les ouvertures,les ébranlements, & les affaissements des terres, & ces causes sont les explosions des volcans, l’action des vapeurs souterraines & les tremblements de terre ; car ils font des bouleversements & des éboulements qui doivent nécessairement former des cavernes & des anfractuosités de toute espèce.

La caverne de saint Patrice en Irlande, n’est pas aussi considérable qu’elle est fameuse, il en est de même de la grotte du chien en Italie, & de celle qui jette du feu dans la montagne de Beni-guazeval au royaume de Fez.

Dans la province de Darby en Angleterre il y a une grande caverne, fort considérable, & beaucoup plus grande que la fameuse caverne de Bauman auprès de la forêt noire, dans le pays de Brunswick. J’ai appris par une personne aussi respectable par son mérite que par son nom (Mylord Comte de Morton) que cette grande caverne, appellée Devel’s-hole, présente d’abord une ouverture fort considérable, comme celle d’une très-grande porte d’église ; que par cette ouverture il coule un gros ruisseau, qu’en avançant, la voûte de la caverne se rabaisse si fort qu’en un certain endroit on est obligé pour continuer sa route, de se mettre sur l’eau du ruisseau dans des baquets fort plats, où on se couche pour passer sous la voûte de la caverne, qui est abaissée dans cet endroit au point que l’eau touche presque à la voûte, mais après avoir passé cet endroit la voûte se relève & on voyage encore sur la rivière jusqu’à ce que la voûte se rabaisse de nouveau & touche à la superficie de l’eau, & c’est-là le fond de la caverne & la source du ruisseau qui en sort ; il grossit considérablement dans de certains temps, & il amène & amoncelle beaucoup de sable dans un endroit de la caverne qui forme comme un cul-de-sac dont la direction est différente de celle de la caverne principale. "

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28 janvier 2011 5 28 /01 /janvier /2011 11:56

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Aujourd'hui, préoccupons-nous de la naissance des îles...

PREUVES DE LA THEORIE DE LA TERRE.
ARTICLE XVII.
Des Isles nouvelles, des Cavernes,

des Fentes perpendiculaires, &c.

" Les Isles nouvelles se forment de deux façons, ou subitement par l’action des feux souterrains, ou lentement par le dépôt du limon des eaux. Nous parlerons d’abord de celles qui doivent leur origine à la première de ces deux causes.
Les anciens Historiens & les voyageurs modernes, rapportent à ce sujet des faits, de la vérité desquels on ne peut guère douter. Sénèque assure que de son temps l’isle de Thérasie parut tout d’un coup à la vue des mariniers. Pline rapporte qu’autrefois il y eut treize isles dans la mer méditerranée qui sortirent en même temps du fond des eaux, & que Rhodes & Délos sont les principales de ces treize isles nouvelles ; mais il parait par ce qu’il en dit, & par ce qu’en disent aussi Ammian Marcellin, Philon, &c. que ces treize isles n’ont pas été produites par un tremblement de terre, ni par une explosion souterraine : elles étaient auparavant cachées sous les eaux, & la mer en s’abaissant a laissé, disent-ils, ces isles à découvert ; Délos avoit même le nom de Pelagia, comme ayant autrefois appartenue à la mer.

Nous ne savons donc pas si l’on doit attribuer l’origine de ces treize isles nouvelles à l’action des feux souterrains ou à quelqu’autre cause, qui aurait produit un abaissement & une diminution des eaux dans la mer méditerranée ; mais Pline rapporte que l’isle d’Hiéra près de Thérasie, a été formée de masses ferrugineuses & de terres lancées du fond de la mer ; & dans le chap. 89, il parle de plusieurs autres isles formées de la même façon, nous avons sur tout cela des faits plus certains & plus nouveaux.

Le 23 mai 1707 au lever du soleil, on vit de cette même isle de Thérasie ou de Santorin, à deux ou trois milles en mer, comme un rocher flottant ; quelques gens curieux y allèrent, & trouvèrent que cet écueil, qui était sorti du fond de la mer, augmentait sous leurs pieds ; & ils en rapportèrent de la pierre ponce & des huîtres que le rocher qui s’était élevé du fond de la mer, tenait encore attachées à sa surface.
Il y avait eu un petit tremblement de terre à Santorin deux jours auparavant la naissance de cet écueil : cette nouvelle isle augmenta considérablement jusqu’au 14 juin, sans accident, & elle avait alors un demi-mille de tour & 20 à 30 pieds de hauteur ; la terre était blanche & tenait un peu de l’argile, mais après cela la mer se troubla de plus en plus, il s’en éleva des vapeurs qui infectoient l’isle de Santorin, & le 16 juillet on vit 17 ou 18 rochers sortir à la fois du fond de la mer, ils se réunirent. Tout cela se fit avec un bruit affreux qui continua plus de deux mois, & des flammes qui s’élevaient de la nouvelle isle ; elle augmentait toujours en circuit & en hauteur, & les explosions lançaient toujours des rochers & des pierres à plus de sept milles de distance. "

...

" On est donc assuré par ces faits & par un grand nombre d’autres semblables à ceux-ci, qu’au dessous même des eaux de la mer les matières inflammables renfermées dans le sein de la terre, agissent & font des explosions violentes.
Les lieux où cela arrive, sont des espèces de volcans qu’on pourrait appeller sous marins, lesquels ne diffèrent des volcans ordinaires que par le peu de durée de leur action, & le peu de fréquence de leurs effets ; car on conçoit bien que le feu s’étant une fois ouvert un passage, l’eau y doit pénétrer & l’éteindre ; l’isle nouvelle laisse nécessairement un vide que l’eau doit remplir, & cette nouvelle terre, qui n’est composée que des matières rejettées par le volcan marin, doit ressembler en tout auMonte di Cenere, & aux autres éminences que les volcans terrestres ont formées en plusieurs endroits ; or dans le temps du déplacement causé par la violence de l’explosion, & pendant ce mouvement, l’eau aura pénétré dans la plupart des endroits vides, & elle aura éteint pour un temps ce feu souterrain.

C’est apparemment par cette raison que ces volcans sous marins agissent plus rarement que les volcans ordinaires, quoique les causes de tous les deux soient les mêmes, & que les matières qui produisent & nourrissent ces feux souterrains, puissent se trouver sous les terres couvertes par la mer en aussi grande quantité que sous les terres qui sont à découvert.
Ce sont ces mêmes feux souterrains ou sous marins, qui sont la cause de toutes ces ébullitions des eaux de la mer, que les voyageurs ont remarquées en plusieurs endroits, & des trombes dont nous avons parlé ; ils produisent aussi des orages & des tremblements qui ne sont pas moins sensibles sur la mer que sur la terre.

Ces isles qui ont été formées par ces volcans sous marins, sont ordinairement composées de pierres ponces & de rochers calcinées, & ces volcans produisent, comme ceux de la terre, des tremblements & des commotions très violentes. "

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22 janvier 2011 6 22 /01 /janvier /2011 06:50

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Aujourd'hui, continuons dans un lon extrait à explorer les tréfonds de notre bonne vieille Terre, secoués par les vents souterrains !

PREUVES DE LA THEORIE DE LA TERRE.
ARTICLE XVI.
Des Volcans & des Tremblements de terre.

" Au Mexique il y a plusieurs volcans dont les plus considérables sont Popochampèche & Popocatepec, ce fut auprès de ce dernier volcan que Cortés passa pour aller au Mexique, & il y eut des Espagnols qui montèrent jusqu’au sommet où ils virent la bouche du volcan qui a environ une demi-lieue de tour. On trouve aussi de ces montagnes de soufre à la Guadeloupe, à Tercère & dans les autres isles des Açores ; & si on voulait mettre au nombre des volcans toutes les montagnes qui fument ou desquelles il s’élève même des flammes, on pourrait en compter plus de soixante ; mais nous n’avons parlé que de ces volcans redoutables, auprès desquels on n’ose habiter, & qui rejettent des pierres & des matières minérales à une grande distance.

Ces volcans qui sont en si grand nombre dans les Cordillères causent, comme je l’ai dit, des tremblements de terre presque continuels, ce qui empêche qu’on y bâtisse avec de la pierre au dessus du premier étage, & pour ne pas risquer d’être écrasés les habitants de ces parties du Pérou ne construisent les étages supérieurs de leurs maisons qu’avec des roseaux & du bois léger. Il y a aussi dans ces montagnes plusieurs précipices & de larges ouvertures dont les parois sont noires & brûlées, comme dans le précipice du mont Ararat en Arménie, qu’on appelle l’Abyme ; ces abymes sont les bouches des anciens volcans qui se sont éteints.
Il y a eu dernièrement un tremblement de terre à Lima dont les effets ont été terribles ; la ville de Lima & le port de Callao ont été presqu’entièrement abîmés, mais le mal a encore été plus considérable au Callao. La mer a couvert de ses eaux tous les édifices, & par conséquent noyé tous les habitants, il n’est resté qu’une tour ; de vingt-cinq vaisseaux qu’il y avait dans ce port, il y en a eu quatre qui ont été portés à une lieue dans les terres, & le reste a été englouti par la mer.
A Lima, qui est une très grande ville, il n’est resté que vingt-sept maisons sur pied, il y a eu un grand nombre de personnes qui ont été écrasées, sur-tout des Moines & des Religieuses, parce que leurs édifices sont plus exhaussés, & qu’ils sont construits de matières plus solides que les autres maisons : ce malheur est arrivé dans le mois d’octobre 1746 pendant la nuit, la secousse a duré 15 minutes. "

...

" Il n’y aurait donc pas d’impossibilité absolue à supposer que les montagnes ont été élevées par des tremblements de terre, si leur composition intérieure aussi-bien que leur forme extérieure, n’étaient pas évidemment l’ouvrage des eaux de la mer.
L’intérieur est composé de couches régulières & parallèles, remplies de coquilles ; l’extérieur a une figure dont les angles sont partout correspondants, est-il croyable que cette composition uniforme & cette orme régulière aient été produites par des secousses irrégulières & des explosions subites ?
Mais comme cette opinion a prévalu chez quelques Physiciens, & qu’il nous parait que la Nature & les effets des tremblements de terre ne sont pas bien entendus, nous croyons qu’il est nécessaire de donner sur cela quelques idées qui pourront servir à éclaircir cette matière.
La terre ayant subi de grands changements à sa surface, on trouve même à des profondeurs considérables, des trous, des cavernes, des ruisseaux souterrains & des endroits vides qui se communiquent quelquefois par des fentes & des boyaux.

Il y a de deux espèces de cavernes, les premières sont celles qui sont produites par l’action des feux souterrains & des volcans ; l’action du feu soûlève, ébranle & jette au loin les matières supérieures, & en même temps elle divise, fend & dérange celles qui sont à côté, & produit ainsi des cavernes, des grottes, des trous & des anfractuosités, mais cela ne se trouve ordinairement qu’aux environs des hautes montagnes où sont les volcans, & ces espèces de cavernes produites par l’action du feu sont plus rares que les cavernes de la seconde espèce, qui sont produites par les eaux.
Nous avons vu que les différentes couches qui composent le globe terrestre à sa surface, sont toutes interrompues par des fentes perpendiculaires dont nous expliquerons l’origine dans la suite ; les eaux des pluies & des vapeurs, en descendant par ces fentes perpendiculaires, se rassemblent sur la glaise & forment des sources & des ruisseaux ; elles cherchent par leur mouvement naturel toutes les petites cavités & les petits vuides, & elles tendent toujours à couler & à s’ouvrir des routes, jusqu’à ce qu’elles trouvent une issue ; elles entraînent en même temps les sables, les terres, les graviers & les autres matières qu’elles peuvent diviser, & peu à peu elles se font des chemins ; elles forment dans l’intérieur de la terre des espèces de petites tranchées ou de canaux qui leur servent de lit ; elles sortent enfin, soit à la surface de la terre, soit dans la mer, en forme de fontaines : les matières qu’elles entraînent, laissent des vuides dont l’étendue peut être fort considérable, & ces vuides forment des grottes & des cavernes produites par les tremblements de terre.

Il y a deux espèces de tremblements de terre, les uns causés par l’action des feux souterrains & par l’explosion des volcans, qui ne se font sentir qu’à de petites distances & dans les temps que les volcans agissent, ou avant qu’ils s’ouvrent ; lorsque les matières qui forment les feux souterrains, viennent à fermenter, à s’échauffer & à s’enflammer, le feu fait effort de tous côtés, & s’il ne trouve pas naturellement des issues, il soulève la terre & se fait un passage en la rejetant, ce qui produit un volcan dont les effets se répètent & durent à proportion de la quantité des matières inflammables.
Si la quantité des matières qui s’enflamment, est peu considérable, il peut arriver un soulèvement & une commotion, un tremblement de terre, sans que pour cela il se forme un volcan ; l’air produit & raréfié par le feu soûterrain, peut aussi trouver de petites issues par où il s’échappera, & dans ce cas il n’y aura encore qu’un tremblement sans éruption & sans volcan, mais lorsque la matière enflammée est en grande quantité, & qu’elle est resserrée par des matières solides & compactes, alors il y a commotion & volcan ; mais toutes ces commotions ne sont que la première espèce des tremblements de terre, & elles ne peuvent ébranler qu’un petit espace.

Une éruption très-violente de l’Etna causera, par exemple, un tremblement de terre dans toute l’isle de Sicile, mais il ne s’étendra jamais à des distances de 3 ou 400 lieues.
Lorsque dans le mont Vésuve il s’est formé quelques nouvelles bouches à feu, il s’est fait en même temps des tremblements de terre à Naples & dans le voisinage du volcan ; mais ces tremblements n’ont jamais ébranlé les Alpes & ne se sont pas communiqués en France ou aux autres pays éloignez du Vésuve ; ainsi les tremblements de terre produits par l’action des volcans, sont bornés à un petit espace, c’est proprement l’effet de la réaction du feu, & ils ébranlent la terre, comme l’explosion d’un magasin à poudre produit une secousse & un tremblement sensible à plusieurs lieues de distance.

Mais il y a une autre espèce de tremblement de terre bien différente pour les effets & peut-être pour les causes, ce sont les tremblemens qui se font sentir à de grandes distances, & qui ébranlent une longue suite de terrain sans qu’il paraisse aucun volcan ni aucune éruption.
On a des exemples de tremblements qui se sont fait sentir en même temps en Angleterre, en France, en Allemagne & jusqu’en Hongrie ; ces tremblements s’étendent toujours beaucoup plus en longueur qu’en largeur, ils ébranlent une bande ou une zone de terrain avec plus ou moins de violence en différents endroits, & ils sont presque toujours accompagnés d’un bruit sourd, semblable à celui d’une grosse voiture qui roulerait avec rapidité.
Pour bien faire entendre quelles peuvent être les causes de cette espèce de tremblement, il faut se souvenir que toutes les matières inflammables & capables d’explosion, produisent, comme la poudre, par l’inflammation, une grande quantité d’air ; que cet air produit par le feu est dans l’état d’une très-grande raréfaction, & que par l’état de compression où il se trouve dans le sein de la terre, il doit produire des effets très violents. supposons donc qu’à une profondeur très considérable, comme à cent ou deux cens toises, il se trouve des pyrites & d’autres matières sulphureuses, & que par la fermentation produite par la filtration des eaux ou par d’autres causes elles viennent à s’enflammer, & voyons ce qui doit arriver, d’abord ces matières ne sont pas disposées régulièrement par couches horizontales, comme le sont les matières anciennes qui ont été formées par le sédiment des eaux, elles sont au contraire dans les fentes perpendiculaires, dans les cavernes au pied de ces fentes & dans les autres endroits où les eaux peuvent agir & pénétrer.

Ces matières venant à s’enflammer, produiront une grande quantité d’air, dont le ressort comprimé dans un petit espace, comme celui d’une caverne, non seulement ébranlera le terrain supérieur, mais cherchera des routes pour s’échapper & se mettre en liberté. Les routes qui se présentent, sont les cavernes & les tranchées formées par les eaux & par les ruisseaux soûterrains ; l’air raréfié se précipitera avec violence dans tous ces passages qui lui sont ouverts, & il formera un vent furieux dans ces routes souterraines, dont le bruit se fera entendre à la surface de la terre, & en accompagnera l’ébranlement & les secousses ; ce vent souterrain produit par le feu s’étendra tout aussi loin que les cavités ou tranchées souterraines, & causera un tremblement plus ou moins violent à mesure qu’il s’éloignera du foyer & qu’il trouvera des passages plus ou moins étroits ; ce mouvement se faisant en longueur, l’ébranlement se fera de même, & le tremblement se fera sentir dans une longue zone de terrain ; cet air ne produira aucune éruption, aucun volcan, parce qu’il aura trouvé assez d’espace pour s’étendre, ou bien parce qu’il aura trouvé des issues & qu’il sera sorti en forme de vent & de vapeur ; & quand même on ne voudrait pas convenir qu’il existe en effet des routes souterraines par lesquelles cet air & ces vapeurs souterraines peuvent passer, on conçoit bien que dans le lieu même où se fait la première explosion, le terrain étant soulevé à une hauteur considérable, il est nécessaire que celui qui avoisine ce lieu, se divise & se fende horizontalement pour suivre le mouvement du premier, ce qui suffit pour faire des routes qui de proche en proche peuvent communiquer le mouvement à une très grande distance ; cette explication s’accorde avec tous les phénomènes.

Ce n’est pas dans le même instant ni à la même heure qu’un tremblement de terre se fait sentir en deux endroits distants, par exemple, de cent ou de deux cents lieues ; il n’y a point de feu ni d’éruption au dehors par ces tremblements qui s’étendent au loin, & le bruit qui les accompagne presque toujours, marque le mouvement progressif de ce vent souterrain."

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14 janvier 2011 5 14 /01 /janvier /2011 17:05

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Aujourd'hui, nous aborderons les volcans, et découvrirons que leur nature n'est pas encore établie avec certitude...

PREUVES DE LA THEORIE DE LA TERRE.

ARTICLE XVI.
Des Volcans & des Tremblements de terre.


" Les montagnes ardentes qu’on appelle Volcans renferment dans leur sein le soufre, le bitume & les matières qui servent d’aliment à un feu suûterrain, dont l’effet plus violent que celui de la poudre ou du tonnerre, a de tout temps étonné, effrayé les hommes, & désolé la terre ; un volcan est un canon d’un volume immense, dont l’ouverture a souvent plus d’une demi-lieue ; cette large bouche à feu vomit des torrents de fumée & de flammes, des fleuves de bitume, de soufre & de métal fondu, des nuées de cendres & de pierres, & quelquefois elle lance à plusieurs lieues de distance des masses de rochers énormes, & que toutes les forces humaines réunies ne pourraient pas mettre en mouvement ; l’embrasement est si terrible, & la quantité des matières ardentes, fondues, calcinées, vitrifiées que la montagne rejette, est si abondante, qu’elles enterrent les villes, les forêts, couvrent les campagnes de cent & de deux cents pieds d’épaisseur, & forment quelquefois des collines & des montagnes qui ne sont que des monceaux de ces matières entassées.
L’action de ce feu est si grande, la force de l’explosion est si violente qu’elle produit par sa réaction des secousses assez fortes pour ébranler & faire trembler la terre, agiter la mer, renverser les montagnes, détruire les villes & les édifices les plus solides à des distances même très considérables.

Ces effets, quoique naturels, ont été regardés comme des prodiges, & quoiqu’on voit en petit des effets du feu assez semblables à ceux des volcans, le grand, de quelque nature qu’il soit, a si fort le droit de nous étonner que je ne suis pas surpris que quelques auteurs aient pris ces montagnes pour les soupiraux d’un feu central, & le peuple pour les bouches de l’enfer.
L’étonnement produit la crainte, & la crainte fait naître la superstition ; les habitants de l’isle d’Islande croient que les mugissements de leur volcan sont les cris des damnés, & que leurs éruptions sont les effets de la fureur & du désespoir de ces malheureux.
Tout cela n’est cependant que du bruit, du feu & de la fumée, il se trouve dans une montagne des veines de soufre, de bitume & d’autres matières inflammables, il s’y trouve en même temps des minéraux, des pyrites qui peuvent fermenter, & qui fermentent en effet toutes les fois qu’elles sont exposées à l’air ou à l’humidité, il s’en trouve ensemble une très grande quantité, le feu s’y met & cause une explosion proportionnée à la quantité des matières enflammées, & dont les effets sont aussi plus ou moins grands dans la même proportion ; voilà ce que c’est qu’un volcan pour un Physicien, & il lui est facile d’imiter l’action de ces feux souterrains, en mêlant ensemble une certaine quantité de soufre & de limaille de fer qu’on enterre à une certaine profondeur, & de faire ainsi un petit volcan dont les effets sont les mêmes, proportion gardée, que ceux des grands, car il s’enflamme par la seule fermentation, il jette la terre & les pierres dont il est couvert, & il fait de la fumée, de la flamme & des explosions. "

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7 janvier 2011 5 07 /01 /janvier /2011 08:33

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Aujourd'hui, il vente...

PREUVES DE LA THEORIE DE LA TERRE.
ARTICLE XIV.

Des Vents Réglés.

" Rien ne parait plus irrégulier & plus variable que la force & la direction des vents dans nos climats, mais il y a des pays où cette irrégularité n’est pas si grande, & d’autres où le vent souffle constamment dans la même direction & presque avec la même force.
Quoique les mouvements de l’air dépendent d’un grand nombre de causes, il y en a cependant de principales dont on peut estimer les effets, mais il est difficile de juger des modifications que d’autres causes secondaires peuvent y apporter.

La plus puissante de toutes ces causes est la chaleur du soleil, laquelle produit successivement une raréfaction considérable dans les différentes parties de l’atmosphère, ce qui fait le vent d’est, qui souffle constamment entre les tropiques, où la raréfaction est la plus grande.
La force d’attraction du soleil, & même celle de la lune sur l’atmosphère, sont des causes dont l’effet est insensible en comparaison de celle dont nous venons de parler ; il est vrai que cette force produit dans l’air un mouvement semblable à celui du flux & du reflux dans la mer, mais ce mouvement n’est rien en comparaison des agitations de l’air qui sont produites par la raréfaction, car il ne faut pas croire que l’air, parce qu’il a du ressort & qu’il est huit cents fois plus léger que l’eau, doive recevoir par l’action de la lune un mouvement de flux fort considérable ; pour peu qu’on y réfléchisse, on verra que ce mouvement n’est guère plus considérable que celui du flux & du reflux des eaux de la mer ; car la distance à la lune étant supposée la même, une mer d’eau ou d’air, ou de telle autre matière fluide qu’on voudra imaginer, aura à peu près le même mouvement, parce que la force qui produit ce mouvement pénètre la matière & est proportionnelle à sa quantité ; ainsi une mer d’eau, d’air ou de vif-argent s’élèverait à peu près à la même hauteur par l’action du soleil & de la lune, & dès-lors on voit que le mouvement que l’attraction des astres peut causer dans l’atmosphère, n’est pas assez considérable pour produire une grande agitation ; & quoiqu’elle doive causer un léger mouvement de l’air d’orient en occident, ce mouvement est tout-à-fait insensible en comparaison de celui que la chaleur du soleil doit produire en raréfiant l’air ; & comme la raréfaction sera toujours plus grande dans les endroits où le soleil est au zénith, il est clair que le courant d’air doit suivre le soleil & former un vent constant & général d’orient en occident : ce vent souffle continuellement sur la mer dans la zone torride, & dans la plupart des endroits de la terre entre les tropiques, c’est le même vent que nous sentons au lever du soleil, & en général les vents d’est sont bien plus fréquents & bien plus impétueux que les vents d’ouest ; ce vent général d’orient en occident s’étend même au delà des tropiques, & il souffle si constamment dans la mer pacifique, que les navires qui vont d’Acapulco aux Philippines, font cette route, qui est de plus de 2700 lieues, sans aucun risque, &, pour ainsi dire, sans avoir besoin d’être dirigez : il en est de même de la mer atlantique entre l’Afrique & le Bresil, ce vent général y souffle constamment. "

...

" Le Docteur Lister, d’ailleurs bon Observateur, prétend que le vent d’est général qui se fait sentir entre les tropiques pendant toute l’année, n’est produit que par la respiration de la plante appellée lentille de mer, qui est extrêmement abondante dans ces climats, & que la différence des vents sur la terre ne vient que de la différente disposition des arbres & des forêts, & il donne très-sérieusement cette ridicule imagination pour cause des vents, en disant qu’à l’heure de midi le vent est plus fort, parce que les plantes ont plus chaud & respirent l’air plus souvent, & qu’il souffle d’orient en occident, parce que toutes les plantes font un peu le tournesol, & respirent toujours du côté du soleil.

D’autres auteurs, dont les vues étaient plus saines, ont donné pour cause de ce vent constant le mouvement de la terre sur son axe, mais cette opinion n’est que spécieuse, & il est facile de faire comprendre aux gens, même les moins initiés en mécanique, que tout fluide qui environnerait la terre, ne pourrait avoir aucun mouvement particulier en vertu de la rotation du globe, que l’atmosphère ne peut avoir d’autre mouvement que celui de cette même rotation, & que tout tournant ensemble & à la fois, ce mouvement de rotation est aussi insensible dans l’atmosphère qu’il l’est à la surface de la terre.

La principale cause de ce mouvement constant est, comme nous l’avons dit, la chaleur du soleil ; on peut voir sur cela le Traité de Halley dans les Trans. philosoph. & en général toutes les causes qui produiront dans l’air une raréfaction ou une condensation considérable, produiront des vents dont les directions seront toujours directes ou opposées aux lieux où sera la plus grande raréfaction ou la plus grande condensation.
La pression des nuages, les exhalaisons de la terre, l’inflammation des météores, la résolution des vapeurs en pluies, &c. sont aussi des causes qui toutes produisent des agitations considérables dans l’atmosphère, chacune de ces causes se combinant de différentes façons, produit des effets différents ; il me parait donc qu’on tenterait vainement de donner une théorie des vents, & qu’il faut se borner à travailler à en faire l’histoire, c’est dans cette vue que j’ai rassemblé des faits qui pourront y servir. "

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