Le plein de mercure
Sans trop de difficultés, Dolph trouva l’unique station service Le Paradis Méhari du Grande Maragnon, paisible village flottant de la baie de Guajará. Étrangement, Wictorius ne parvenait pas à apercevoir le moindre mendiant ou bicoque mal fichue en vieux métal rouillé, signe de grande pauvreté. Tout était en fibre à tout faire repeinte à neuf.
- Chef, vous avez vu la queue devant les pompes ?
- Eh bien, nous patienterons… Espérons surtout qu’il reste du mercure en cuve…
Dolph et Sylvester entonnèrent quelques chansons gaillardes pour passer le temps et Beatrix reprenait son interminable tricot. Wictorius se fit un bon triple café, à l’épaisse mousse brune. Il fallait savoir profiter des rares moments où l’Ennemi se faisait discret.
Enfin, ce fut leur tour.
- Du mercure ? Mais bien sûr que j’en ai ! C’est le carburant favori des autochtones, il ne coûte quasiment rien à récolter, cette saloperie suinte de partout ! Il servait à extraire le précieux métal jaune. Cet or artificiel a tué toute une culture d’orpailleurs… Ce sera quarante brazols le litre. Comment chère Senhora, c’est dispendieux ? Mais c’est que j’ai des frais, le mercure se fait rare dans certaines zones et nous avons les Protecteurs de la Nature qui font régulièrement des descentes meurtrières. Voyez, j’ai toujours sur moi un pistolet chargé, on n’est jamais trop prudent. Des arbres qui bougent ? Non, je n’en ai pas vu… Vous êtes catholiques, n’est-ce pas ? Joli chapelle... Faut avoir du courage pour espérer évangéliser ces sauvages emplumés. Ils ne sont plus ce qu’ils étaient, vous serez bien surpris. Mais je ne vous ai pas dit comment je m’appelle ! Rolando Polze d’Ivoy de la Poipe. Mes ancêtres ont fui au siècle dernier l’ancienne Guyane française voisine. Quelle tristesse, il n’y a plus que des fusées amérindiennes qui décollent…
La suite demain !